• Cette fois-ci, c'est la bonne !

    Après plusieurs annulations, nous avons enfin pu assister à la visite guidée qu'Anne-Marie avait prévue pour ce mois de janvier dans le cadre de son atelier "Petites promenades dans Paris" : celle de la Fondation Eugène Napoléon sise au 254, rue du faubourg Saint-Antoine dans le 12ème.

    Notre guide - tout comme la semaine dernière pour la visite de l'Hôtel de Soubise - est toujours Gilbert Obel, de l'association "Paris Art et Histoire". Celui-ci va nous raconter tellement de choses (sans jamais regarder une note) que le post qui suit fera pâle figure au regard de sa conférence.

    Mais enfin, c'est tout de même mieux que rien, non ?

    L'histoire commence en 1834, année pendant laquelle la comtesse de Montijo, fuyant les remous des guerres carlistes, emmène ses deux filles en France, notamment dans la station balnéaire de Biarritz, proche de la frontière espagnole. Amie de Prosper Mérimée et de Stendhal, elle s'installe ensuite en 1854 avec ses filles dont Eugénie, la cadette, au 12 place Vendôme. Entre Biarritz et Paris, c’est Stendhal qui enseigne l’histoire aux deux jeunes filles et Mérimée, le français.

    Les trois femmes sont régulièrement invitées aux cérémonies officielles données par le Prince-Président Louis Napoléon Bonaparte qui, à 44 ans, est encore célibataire même s'il a une vie amoureuse bien remplie. Dès qu'il fait connaissance de la jeune et jolie Eugénie qui n'a, elle, que 25 ans, il s'en éprend rapidement.

    "J'ai préféré une femme que j'aime et que je respecte à une femme inconnue dont l'alliance aurait eu des avantages mêlés de sacrifices" dira-t-il pour justifier son choix.

    Eugénie est ici peinte par Franz Xaver Winterhalter en 1857 qui fût le portraitiste attitré du gotha européen durant le deuxième tiers du XIXème siècle. Avouez que le futur Napoléon III n'a pas fait un mauvais choix.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Le 26 janvier 1853, la Commission municipale de Paris vote une somme de 600.000 francs or pour l'acquisition d'un collier de diamants destiné à l'impératrice Eugénie, à l'occasion de son mariage avec Napoléon IIIPour se rendre compte de la somme que cela représente, il faut savoir qu'à cette époque le salaire journalier d'un ouvrier tourne autour des 2 francsCependant, deux jours plus tard Eugénie refuse le collier, souhaitant qu'avec cet argent soit créé "un établissement d'éducation gratuite pour les jeunes filles pauvres", ce qu'entérine une seconde délibération de la Ville.

    « Monsieur le Préfet,

    Je suis bien touchée d’apprendre la généreuse décision du Conseil Municipal de Paris qui manifeste ainsi son adhésion sympathique à l’union que l’Empereur contracte. J’éprouve néanmoins un sentiment pénible en pensant que le premier acte public qui s’attache à mon nom au moment de mon mariage soit une dépense considérable pour la Ville de Paris. Permettez-moi donc de ne pas accepter votre don, quelque flatteur qu’il soit pour moi, vous me rendrez plus heureuse en employant en charité la somme que vous aviez fixée pour l’achat de la parure que le Conseil Municipal voulait m’offrir. Je désire que mon mariage ne soit l’occasion d’aucune charge nouvelle pour le pays auquel j’appartiens désormais et la seule chose que j’ambitionne, c’est de partager avec l’Empereur l’amour et l’estime du peuple français.

    Je vous prie, M. le Préfet, d’exprimer à votre Conseil toute ma reconnaissance et de recevoir pour vous mes sentiments distingués.

    Eugénie, Comtesse de TEBA.

    Palais de l’Elysée, le 26 janvier 1853 »

    La somme servira à la construction des bâtiments actuels situés sur les dépendances de l'ancien marché aux fourrages de la barrière du trône, comme nous l'explique notre guide. Il fallait en effet une surface suffisante pour accueillir soixante jeunes filles (chiffre qui montera très vite à trois cents) dont le séjour devait se prolonger jusqu’à leur majorité (alors de 21 ans). Là, elles apprendraient, outre les fondamentaux de l'école (lire, écrire, compter), à coudre et à broder (les chasubles d'église en particulier), à repasser. Pour résumer, toutes les tâches ménagères réservées aux filles à une époque où la femme était réduite à la seule fonction de maîtresse de maison s'occupant des enfants. (Photo 2016)

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Pour vous situer le lieu, celui-ci se trouve entre la rue du faubourg Saint-Antoine et le boulevard Diderot : Vue d'avion, les bâtiments sont vraiment impressionnants !

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    En hommage au geste généreux de l'impératrice, l'architecte Jacques Ignace Hittorff concevra un établissement de plan octogonal calqué sur la forme d'un collier dont le salon d'apparat sert de fermoir et la chapelle de pendentif.

    Terminée l’année de la naissance du jeune Prince impérial en 1856 (il naît le 16 mars 1856), l’institution prend le nom de « Maison Eugène-Napoléon ». Elle ouvre ses portes le 1er janvier 1857. L'œuvre est confiée aux Sœurs de la Charité de Saint-Vincent de Paul qui resteront présentes sur le site jusqu'en 1976. La Fondation s’ouvre à la mixité en 1984, mais doit fermer son internat en 1994, les locaux n’étant plus aux normes. Après douze années de combat difficile, un nouveau projet se met en place, avec l’aide de la Région, de la Mairie de Paris, des Petits Chanteurs à la Croix de Bois et de la Congrégation Notre Dame.

    Paris doit à Hittdorff, architecte de la Ville et du gouvernement, l'église Saint-Vincent de Paul, la gare du Nord, le cirque d'hiver, et les aménagements de la place de la Concorde, des Champs-Elysées et du bois de Boulogne.

    Les photos qui suivent ont été, pour certaines, prises en 2016 lors d'une précédente visite avec M. Obel. C'est la raison pour laquelle, elles sont plus ensoleillées par rapport au temps couvert d'hier... Parfois, une petite piqure de rappel ne fait pas de mal tant il y a de choses à retenir !

    Entrée principale à l'angle du faubourg Saint-Antoine et de la rue de Picpus : en 2019, le jardin de la Fondation Eugène Napoléon a pris le nom de Jardin de l'Impératrice Eugénie.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Sur le fronton, le nom de l'institution et celui de sa fondatrice (Photo 2016)

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    L'établissement, qui accueille des jeunes filles, est sécurisé : nous entrons dans l'institution en passant sous le passage couvert en fer forgé situé sur le côté droit.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Dans le vestibule, la quinzaine d'adhérents qui se sont inscrits à cette visite guidée.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Monsieur Obel nous montre ici l'endroit où nous nous trouvons : le fermoir du collier !

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Le vestibule donne accès au Salon de l'impératrice. Cette pièce est toujours dans son état d'origine : les lourdes tentures de velours de soie cramoisi et la moquette très "anglaise" n'ont pas été changés depuis le XIXème siècle, paraît-il. De larges baies vitrées en font une pièce très bien éclairée.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Nous prenons place autour de l'immense table en palissandre.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

     

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Le mobilier (12 fauteuils et 12 chaises) est à l'effigie de Napoléon et d'Eugénie.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Encadrant la porte d'entrée, des portraits en pied des deux souverains par Franz Walter WinterhalerIl s'agit de copies exécutées par Anton Hansmann car les originaux ont disparu dans l’incendie du palais des Tuileries en 1871. M. Obel nous a dit qu'il en existait de nombreuses, au Louvre, à Versailles, à Saint-Cloud, et bien d'autres encore.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    L'impératrice Eugénie : Debout, en robe à crinoline, l’impératrice se tourne vers le spectateur en désignant les jardins du Palais des Tuileries. Elle arbore son très fameux diadème de perles et de diamants créé par Lemonnier. Dentelles et manteau vert émeraude contrastent avec les rideaux d’apparat rouges, qui s’ouvrent comme sur un décor de théâtre.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    En pendant, de l'autre côté de la porte d'entrée, le portrait de Napoléon III 

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    L'Empereur des français porte la Légion d’honneur, soulignant ainsi qu’il entend renouer avec les heures brillantes du règne de son oncle, Napoléon. Il tient dans la main gauche la main de Justice à côté de laquelle se trouvent le sceptre er la couronne impériale.

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

    Les superbes cadres en bois doré mettant en valeur ces portraits sont surmontés du blason de la famille impériale : on y voit l'aigle impérial, au centre d'une croix formée par le sceptre et la main de justice. Une couronne surmonte l'ensemble.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Le style Louis XVI domine dans cette élégante pièce servant de lieu de réception et de repos à l'Impératrice. Les trumeaux des portes sont ornés d'un médaillon contenant les initiales des deux souverains, lequel médaillon est surmonté d'une couronne. En outre, une très élégante frise orne le plafond.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Une cour sépare le Pavillon d'Eugénie - abritant le salon de l'impératrice - de la chapelle, placée par l’impératrice sous la protection de la Vierge. On laisse derrière soi un bâtiment auquel l'architecte, Hittorff - qui était allé en Sicile et y avait constaté une antiquité colorée très différente de la perception monochrome du Premier Empire - a voulu donner un peu de couleur par le mariage de la pierre et de la brique. (Photo 2016)

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Une statue de Saint-Vincent de Paul, patron des associations charitables, fait face à la chapelle. (Photo 2016)

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Trois statues ornent la façade : L'Espérance, la Foi et la Charité.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    La Charité est traditionnellement représentée par une femme tenant un bébé dans ses bras tandis qu'elle s'occupe tendrement d'un ou deux autres.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Entrons !

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    On est tout de suite interpellés par le plafond composé de caissons ornés de peintures sur toiles marouflées représentant des lys, des roses, des croix, des couronnes, des monogrammes de Marie (AM pour Ave Maria) et d’Eugénie (EM pour Eugénie de Montijo) dans des soleils sur fond bleu.

    Vue sur le plafond du côté du grand orgue Cavaillé-Coll

    Visite guidée de la Fondation Eugène Napoléon avec "Paris Art et Histoire"

     

    Côté chœur

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    La fresque du chœur (de Félix Joseph Barrias) évoque l’origine de l’œuvre : l’impératrice offre symboliquement son collier à la Vierge en présence des orphelines de sa Fondation et des Sœurs de Saint-Vincent de Paul.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Dans sa peinture, Barrias a représenté l’impératrice agenouillée en orante devant la Vierge en MajestéCette position de prière (bras ouverts, paumes vers les cieux et doigt écartés) est celle des premiers chrétiens.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Dans la partie haute de la fresque, on voit Marie et l’enfant trônant, entourés de Sainte-Catherine et de Saint-Vincent de Paul. La tonalité jaune du ciel remplace le fond d’or des mosaïques byzantines habituellement utilisé dans les sujets sacrés pour illustrer la présence divine.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    L’impératrice est représentée en robe de mariée avec dans sa main gauche un collierOn peut penser que ce collier est celui que la ville de Paris envisageait de lui offrir à l'occasion de son mariage.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Cette robe était « en velours épinglé blanc, constellée de pierreries. Le corsage montant avait de grandes basques rondes garnies de volants d’Angleterre et de deux rangées de diamants. Le devant du corsage, orné également de point d’Angleterre, coquillé droit, était enrichi depuis le haut jusqu’en bas d’épis en diamants formant brandebourg, au centre desquels brillait une étoile en guise de bouton. Les larges manches « pagodes » étaient décorées de quatre rangées de point d’Angleterre et entre chaque rangée scintillaient des diamants. […] La jupe et la robe étaient en demi-queue traînante, toute recouverte de point d’Angleterre » .

    Barrias a pris soin de ne pas mettre en avant les bijoux portés par l’impératrice. Les diamants ont disparu dans le blanc de la robe. Il a bien représenté à la ceinture l’étoile qui sert de bouton mais ne lui a donné aucun éclat.

    Derrière l’impératrice, sont représentées des mères qui confient leurs filles à l’institution. L’une d’elles exprime sa reconnaissance en embrassant la robe d’Eugénie. Une autre, qui tient sa fille dans ses bras, invoque la Vierge en levant son doigt au ciel.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Au second plan, à l’extrême droite de la peinture, nous apercevons l'architecte Hittorff : il arbore sur sa veste, bien visibles, ses différentes décorations dont la légion d’honneur. Barrias s’est lui aussi représenté : c’est d’ailleurs l’un des rares portraits qu’on ait de lui à l’âge de 34 ans. Il porte, par dessus de son costume, sa blouse bleue de peintre et tient dans sa main la casquette des plâtriers, peintres en bâtiments et à fresque.

    À gauche de la fresque se tiennent des jeunes filles déjà accueillies par l’institutionElles sont habillées uniformément : robes de mérinos gris aux cols blancs, liserés bleus retenant des médailles de la Vierge et bottines grises. Leurs cheveux sont couverts d’un bonnet de dentelles noires (réservé pour les cérémonies religieuses). Deux sœurs de Saint-Vincent de Paul les encadrent. Au second plan, assisté de deux enfants de chœur, un prêtre tient une bible.

    Les pensionnaires prient pour leur bienfaitrice et deux d’entre elles répandent à ses pieds des roses – attribut de la Vierge –, rappel du jeté de pétales de roses effectué lors des processions de la Fête-Dieu.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Deux statues dans le chœur

    Eugène à droite, Napoléon à gauche pour Eugène Napoléon, le fils d'Eugénie !

    Saint-Eugène

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Saint-Napoléon.

    A noter que sous les Premier et Second Empire, la Saint-Napoléon est la fête nationale instituée le jour de la naissance de Napoléon Ier, le 15 août.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    La statue de la Vierge située à droite du chœur rappelle que la chapelle lui est consacrée.

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    La cour de récréation des élèves donne sur l'arrière de la chapelle. (Photo 2016)

    D'un collier de diamants à un collier de pierre...

    Les Petits Chanteurs à la Croix de Bois ont maintenant élu domicile à Autun et actuellement, la Fondation abrite deux établissements de l'Enseignement Catholique, l'Ensemble Scolaire Saint Pierre Fourier (enseignement élémentaire et secondaire) dans l'une de ses ailes tandis que l'autre est occupée par l'Institut supérieur Clorivière qui dispense des formations aboutissant à un BTS en Economie Sociale et Familiale, Tourisme, Management et même Œnologie. ainsi qu'une résidence pour étudiantes d'une capacité de 87 chambres.

    La Fondation ouvre son site au quartier et aux Parisiens par un programme d’activités culturelles proposées par la Ville de Paris, la mairie du XIIe et son conservatoire, par ses propres manifestations musicales et artistiques, des conférences ou des expositions et par l’ouverture au public du jardin de la rue Picpus.

    Merci à M. Obel pour cette visite passionnante et à Anne-Marie pour l'avoir organisée : une découverte pour tous et toutes.


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    Lucie Pierre, notre conférencière bénévole en Histoire de l'art, nous dit tout d'abord que l'amour est une construction sociale : Et bang, voici que tous mes rêves s'écroulent ! Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    Mais restons sérieux : Lucie nous donne ensuite le plan de l'ensemble des conférences quelle va consacrer à ce sujet, extrêmement vaste, à savoir le couple dans la peinture.

    A) Les représentations de l'amour au cours des siècles

    1) Les représentations de l'amour au Moyen-Age : l'amour "courtois".

    L’art médiéval est principalement consacré à la religion. À l’époque, on célébrait « l’amour courtois » en séduisant les dames avec des poésies, mais on n’aurait jamais osé dessiner l’amour cru et l’exposer au vu et au su de tous.

    2) L'amour à la Renaissance : érotique

    Les peintres libèrent enfin leurs créativités et les images de nus fusent.

    3) L'amour baroque : fou et exalté

    Le contenu émotionnel très apparent est l’un des caractéristiques de la peinture baroque. Et quelle émotion est plus forte que l’amour ?

    4) L'amour à l'époque du Romantisme : passionnel

    Le courant artistique du Romantisme met, évidemment, au centre de tout, l’amour !

    5) L'amour à la période du Réalisme

    Étant donné que ce courant vise à traiter la vision du monde de manière objective, les peintres essaient toujours de représenter les faits tels qu’ils sont.

    6) L'amour dans le courant de l'impressionnisme avec Manet...

    Lucie nous parle ensuite de la "classification" qui a été faite de l'amour.

    B) Les différentes sortes d'amour

    I) L'amour "Philia" : l'amour affectueux

    L’amour « Philia » est l’attachement lié à un sentiment d’amitié, associé à des valeurs, des centres d’intérêts et des objectifs communs. Il prend appui sur des plaisirs partagés, des échanges, du jeu, de la solidarité et de la complicité. La relation est chaleureuse et affective, chacun ayant le souci de l’autre. Cependant, il est conditionnel car fondé sur des activités ou des vécus partagés.

    II) L'amour "agapè" : désintéressé

    L’amour « Agapé » est un amour fraternel, universel, altruiste, spirituel. Il se donne « gratuitement », de manière désintéressée, sans attendre de retour. Il est inconditionnel, accepte l’autre tel qu’il est, avec ses qualités et ses défauts. Il souhaite son bien-être sans profit personnel. Il a de la compassion pour l’autre et l’aime… même s’il n’est pas aimé de lui. C’est un amour affranchi de l'ego qui se situe au-delà de l’émotionnel.

    III) L'amour qui prend : l'éros

    L’amour « Éros » est fondé sur une relation sensuelle, charnelle, sexuelle, éventuellement amoureuse et passionnelle. Ce peut être l’ivresse d’un « coup de foudre » qui induit un fort désir de l’autre. Cela peut être délicieux et… ravageur.

    IV) L'amour ludus : espiègle

    L'amour Ludus renvoie à un amour charmeur et taquin, un amour qui s’accompagne de danses et de rires. C’est un amour enfantin et léger.

    V) L'amour Mania : obsessionnel

    L’amour Mania est le type d’amour qui entraîne un partenaire dans une sorte de folie et d’obsession. Cela se produit généralement lorsqu’il y a un déséquilibre entre l’Eros et l’amour Ludus.

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    Il faut tout de suite savoir que ce que je retranscris ici est sans doute entaché d'erreurs par ci par là, mais... l'erreur est humaine n'est-ce pas !

    Autre chose : les photos sont cliquables mais si parfois elles s'agrandissent, parfois elles rapetissent.

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    Lucie va d'abord nous parler, images à l'appui, de l'amour dans l'iconographie religieuse et pour cela elle a choisi de nous parler d'Adam et Eve.

    I - Le couple d'Adam et Eve

    A noter que les deux jeunes gens, qui succombent à la tentation provenant du serpent démoniaque, devraient être représentés laids et pourtant, de façon générale, ils sont toujours beaux.

    ► La tentation d'Adam et Eve de Masolino dite "Le pêché originel" (1424-1425) - Chapelle Brancacci en l'église Santa Maria del Carmine de Florence

    Adam et Eve sont ici au Paradis : ils sont représentés se regardant mais sont plutôt statiques. Le serpent, enroulé autour d'un figuier (l'arbre du péché), est représenté avec une tête de jeune femme et se tient à égale distance d'Adam et d'Eve, les rendant responsables, aussi bien l'un que l'autre, de l'acte qu'ils vont accomplir.

    On notera aussi que, aussi incongru que cela puisse paraître, le peintre a peint les deux jeunes gens avec un nombril.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve chassés de l'Eden - Masaccio (1424-1425) - Chapelle Brancacci de l'église Santa Maria del Carmine de Florence

    Masaccio était l'élève de Masolino.  

    Cette fois-ci le peintre représente les deux jeunes gens alors qu'ils sont chassés du Paradis. Les visages sont très expressifs, Eve a les yeux fermés parce qu'elle pleure et Adam se cache le visage en signe de honte. Les corps sont en mouvement et le peintre représente même les ombres sur le sol.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► La tentation d'Adam et Eve - Hugo Van der Goes (vers 1490) - Musée d'Histoire de l'art de Vienne

    Adam tend la main vers Eve, prêt à prendre le fruit défendu. Le serpent tentateur est dépeint comme une créature bipède ressemblant à une salamandre : en effet, d'après le mythe, le serpent pouvait marcher avant que la malédiction de Dieu ne l'oblige à ramper et à manger de la poussière.

    Le motif de serpent à tête humaine apparaît dans l'art à la fin du XIIIe siècle et est abandonné à la Renaissance.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve - Albrecht Dürer (1504) - Rijksmuseum à Amsterdam

    Ce chef-d'œuvre absolu de la gravure fait assister à un moment fatidique : Adam et Eve, flirtant avec la tentation, vont dans un instant croquer le fruit défendu qui leur est présenté par le serpent. D'un geste placé au centre de la composition, Adam accepte l'offre d'Eve qui va conduire les hommes à la perdition, et pointe déjà du doigt la nudité bientôt honteuse de sa compagne.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Le péché originel et l'expulsion du Paradis terrestre - Michel-Ange (1509-1510) - Plafond de la Chapelle Sixtine à Rome

    Le crucifié est allégoriquement présent dans cette scène, puisque le bois de la croix sera taillé dans l'arbre dont Adam cueille le fruit, afin que toute faute soit remise. On remarquera comment Michel-Ange a associé le diable tentateur (représenté par un serpent à tête de femme) et l'Ange qui refoule hors du paradis nos premiers parents : comme si, dès l'origine, la chute et sa Rédemption, le Démon et l'Ange, étaient indissolublement liées.

    Une fresque hyper connue mais qu'on ne se lasse pas de regarder...

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

     ► Adam et Eve de Jan Gossaert dit "Mabuse" (vers 1520) - Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique

    Mabuse est un important peintre néerlandais actif au XVIe siècle. Il a voyagé en Italie et en Europe du Nord et l'influence de ces voyages est clairement évidente dans son travail.

    Le peintre s'inspire ici de la gravure de Dürer sur le même sujet comme on peut le voir dans la pose d'Adam et Eve avec l'arbre entre eux. Néanmoins, Gossaert a introduit des changements importants tels que la direction dans laquelle les têtes sont tournées. De manière traditionnelle, Adam est situé à gauche et Eve à droite, tenant la pomme que le serpent lui a donnée.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► La tentation d'Adam et Eve par Le Tintoret (1550) - Galeries de l'Académie à Venise

    Un piédestal est composé d'un mur de pierre à deux niveaux. Adam est assis sur la partie la plus basse, sur la gauche, et Ève, sur le muret légèrement plus élevé, à sa droite. Au centre entre les deux figures humaines, attaché au muret, se trouve l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal dont Dieu avait dit au premier-né de ne pas manger le fruit.

    Vous remarquerez qu'Adam est souvent représenté toujours en plus foncé qu'Eve et que celle-ci se tient toujours à la droite d'Adam.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve par Baldung Grien (1520) - Galerie des Offices à Florence

    Il s'agit d'un diptyque exécuté par Hans Baldung, un élève de Dürer. On y voit le cerf dans le tableau d'Adam et le lion dans celui d'Eve.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve couchés dans le Jardin d'Eden - Hendrick Goltzius (1616)

    Dans cette œuvre proche du Baroque, la position des deux amants est inhabituelle. Le peintre, en plaçant les personnages presque grandeur nature si près de l'avant du plan de l'image, incite le spectateur à s'engager émotionnellement dans ce récit biblique. On remarque en outre la présence du bouc et du chat, symboles de la lubricité.

    Adam

    ► Adam et Eve chassés du Paradis - Giuseppe Della Porta Salviati (1526-1550) - musée des Augustins à Toulouse

    Le mouvement de la main d’Adam indique qu'il rejette la faute sur sa compagne, alors qu’Eve semble reprocher au serpent sa funeste situation. La couleur du ciel annonce le châtiment...

    On pense à Michel-Ange.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve - Domenico Zampieri dit "Le Dominiquin" (1623-1624) - musée de Grenoble

    Cette œuvre a appartenu au jardinier du roi Le Nôtre avant de rejoindre les collections royales en 1693.

    Dans la partie gauche du tableau, Adam rejette la faute sur Eve, en haussant les épaules d'une façon de dire qu'il n'avait pas trop eu le choix. Et Eve de vite rejeter la responsabilité sur le serpent qui l'a tentée par des doux mots.

    Le Dominiquin porte par ailleurs un grand intérêt à la nature qui devient ainsi une composante importante du tableau. Il faut noter de cette façon la netteté de la touche pour exprimer le feuillage, où chaque feuille est un élément indépendant de l'autre.

    Avec le Michel-Ange, j'en pince pour celui-ci...

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve - Rembrandt (1638) 

    Rembrandt, dans cette eau-forte, abandonne ici les canons classiques de la beauté pour nous montrer un couple vieillissant  avec des corps charpentés, profondément humains. Eve, par sa position au centre de la feuille, s'impose comme le personnage principal. Le dragon et l'arbre de la connaissance au premier plan, confondus dans une seule structure, enveloppent le couple qui apparaît à contre-jour, isolé du jardin d'Éden, en pleine clarté en arrière-plan et en contrebas.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Adam et Eve - Jacob Jordaens (vers 1640) - musée national de Varsovie

    Jacob Jordaens est un peintre de la peinture anversoise du XVIIe siècle.

    Jordaens s'est intéressé au sujet d'Adam et Eve et en a fait une représentation illustrant la Chute de l'Homme. Le tableau, plus qu'une simple scène biblique, est un véritable récit de la déchéance de l'homme. Cette représentation inhabituelle de la Genèse serait-elle l'un des prémices de la conversion de Jordaens au calvinisme ?

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    On pourrait continuer comme cela longtemps tant les peintres de toutes époques ont été inspirés par le récit de la Genèse. Mais il faut passer à autre chose...

    II) La peinture profane du couple

    ► Portrait des époux Arnolfini par Jan Van Eyck (1434) - National Gallery de Londres

    Le sujet est très moderne pour l'époque où il était coutume de représenter des scènes religieuses. Le peintre représente un jeune couple se tenant par la main, délicatement. La bougie allumée sur le lustre indique sans doute qu'un contrat de mariage va se faire. En effet, au Moyen-Age, les peintures et notamment les portraits, pouvaient servir de demandes en mariage ou encore de commémoration d’un mariage pour un couple. La femme n'est pas enceinte d'après Lucie (elle nous dit qu'il était à la mode à cette époque de porter un coussin sous sa robe). On note la tenture rouge du lit, le rouge est la couleur de la passion et c'est aussi la couleur complémentaire du vert de la robe de la jeune femme. Le petit chien serait un symbole de fidélité.

    Le peintre s'est représenté par son reflet dans le miroir au fond de la pièce.

    De mon côté, j'ai lu que le portrait de la jeune femme pourrait être celui d'une morte, ce qui expliquerait le costume sombre de l'homme et le port de son chapeau noir.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Portrait d'une femme à sa fenêtre avec un homme - Fra Filippo Lippi (vers 1440) - Metropolitan Museum of Art de New-York

    La femme occupe presque tout le tableau. Elle est représentée de profil, richement vêtue à la française et parée de bijoux, avec une haute coiffe caractérisée par un double rabat de tissu écarlate tombant sur les épaules. Elle se tient devant une fenêtre, où un jeune homme devant elle semble l'observer mais en réalité l'homme et la femme ne se regardent pas (la morale est respectée). Derrière la femme, il y a une fenêtre ouverte d'où l'on aperçoit un paysage rural qui serait, d'après Lucie, le patrimoine que la femme apporte à son futur mari.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Double portrait du duc d'Urbino par Piero Della Francesca (1473-1475)

    Alors là, Lucie nous dit tout !

    Si l'homme a été représenté selon son profil gauche, c'est qu'il est borgne (il a été blessé) et s'il a un chapeau, celui-ci sert à cacher sa calvitie. Sa femme est morte en couches, il s'agit donc du portrait d'une morte.

    L'arrière-plan résulte d'une grande étude de perspective et d'influences flamandes qui donne à la composition une ouverture par un paysage. 

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Le prêteur et sa femme - Quentin Metsys (1514) - musée du Louvre à Paris

    Le prêteur pèse l'argent sur un trébuchet (le trébuchet est à l'origine de l'expression "argent sonnant et trébuchant) comme Dieu pèse les âmes.

    On est ici dans les prémices du capitalisme mais la femme est là pour rétablir le bon ordre des choses : elle lit un livre d'heures, en référence au monde chrétien. Il s'agirait ainsi d'une œuvre à caractère allégorique et moralisateur, sur le thème de la vanité des biens terrestres opposés aux valeurs chrétiennes intemporelles, et d'une dénonciation de l'avarice, comme péché capital.

    Très joli !

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Portrait d'Henri IV de Saxe et de Catherine de Meklembourg - Lucas Cranach l'ancien (1514) - musée de Dresde

    Il s'agit d'un tableau double d'un artiste de la Renaissance allemande, Lucas Cranach qui fut toute sa vie peintre des princes électeurs de Saxe.

    Le peintre a fait le choix de ne pas peindre de décor mais de mettre l'accent sur les deux personnages portant des vêtements richement ornés, dont les motifs évoquent les armoiries de leurs familles respectives. Le duc, représenté avec l'un de ses chiens de chasse, plutôt menaçant, est en train de tirer son épée du fourreau ; son épouse a, à ses pieds, un chien de compagnie. Le panneau représentant la duchesse porte un cartouche avec les initiales du peintre, l'année où le tableau a été réalisé, et un serpent ailé, symbole de l'atelier de Lucas Cranach.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Portrait du comte da Porto et de femme - Paolo Véronèse (1552) 

    Lucie nous fait remarquer la manière attendrissante qu'ils ont de tenir leurs enfants par l'épaule. La femme porte une fourrure de martre, symbole d'un accouchement. A noter ici encore, les deux couleurs complémentaires, le rouge et le vert.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Portrait d'un couple marié : Massimo Cassotti et sa femme Faustina  - Lorenzo Lotto (1523) - musée du Prado à Madrid

    Un petit Cupidon pose un joug sur les épaules du couple (origine du mot "subjugué") en allusion aux obligations qu’ils contractent en se mariant. Le laurier qui sort du joug est un symbole de vertu et évoque la fidélité. Le collier de perles que porte Faustina est le symbole de son assujettissement à son mari. Le fait de la représenter plus bas que son époux illustre son infériorité sociale. La femme porte un camée représentant la femme de Marc-Aurèle qui était très prolifique.

    L'homme s'apprête à passer un anneau au doigt de sa future épouse : cette coutume remonte à l'antiquité, époque à laquelle on pensait qu’une veine reliait l’annulaire gauche au cœur, siège des sentiments et de la passion amoureuse, la veine de l’amour.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Double portrait d'un homme et de sa femme - Lorenzo Lotto (1523-1524) - musée de l'Ermitage à Saint-Petersbourg

    Lotto inaugure le portrait psychologique, cherchant à pénétrer dans chaque homme qui pose devant lui ce qui lui est propre : son caractère.

    Le couple est représenté dans un geste d'intimité affectueuse, la main de la femme se penchant sur l'épaule de son mari. Divers détails témoignent de leur statut social élevé, leurs vêtements bien à la mode de l'époque ainsi que l'exotique tapis Anatolien couvrant la table. La femme tient dans ses bras un petit chien, symbole typique de la fidélité conjugale et porte des bijoux et une coiffure "capigliara" composée de faux cheveux et de tissus de soie bouclés, enfermée dans un filet souvent accompagné de pierres précieuses et de perles.

    Si vous n'avez pas compris que le rouge (du tapis) et le vert (du rideau) sont complémentaires...

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Jan Rikcjsen et son épouse Griet Jans dit "Le constructeur de bateau" - Rembrandt (1633) - Buckingham Palace

    Rembrandt excelle à représenter avec beaucoup de réalisme la relation du couple dans une situation du quotidien intime. C’est une de ses grandes tendances de « brouiller les pistes », de décloisonner les genres en mélangeant ici portrait de couple et scène de genre. Le costume des personnages est très sobre (et sombre), l’œil n’est pas distrait par sa richesse et peut se concentrer sur la scène d’intimité du couple. Aucun cérémonial, aucune solennité ne raidit les modèles ici.

    Il s'agit d'un portrait "parlant" : Griet entre dans le bureau de son mari et lui tend un billet (à la place d'un serviteur). Elle tient encore la poignée de porte comme pour dire à son mari qu'on voit le compas à la main en train de travailler "je ne te dérange pas longtemps"... 

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    ► Le ministre mennonite Cornelius Claesz Anslo et sa femme Heltje - Rembrandt (1641) - musée de Berlin

    Autre portrait "parlant" : le geste de la main de l'homme (pasteur mennonite) montre la Bible ouverte devant lui où se trouve la parole qu'on ne peut pas peindre, la parole divine.

    Lui parle, elle, elle écoute : distribution des rôles entre l'homme et la femme qui doit rester soumise à son mari.

    Je trouve ce tableau absolument sublime.

    Histoire de l'art : le couple jusqu'au 19ème siècle à Générations 13

    Fin de la première conférence sur "Le couple dans l'art". Lucie nous a annoncé deux autres conférences sur le même thème.

    Un grand merci à Lucie pour cet exposé tout à fait passionnant.


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    Vendredi dernier, Anne-Marie Guérin qui anime l'atelier "Petites Promenades dans Paris", nous a proposé, comme c'est souvent le cas en période hivernale, une visite "au chaud", celle de l'Hôtel de Soubise, le siège des Archives Nationales à Paris mais également un Hôtel particulier datant du 14e siècle.

    Cette visite nous est comme d'habitude proposée pour un prix défiant toute concurrence par l'association Paris Art et Histoire avec laquelle nous avons un partenariat et c'est Gilbert Obel qui est aux commandes.

    Voici ce que j'en ai retenu.

    C'est à partir de 1371 qu'Olivier de Clisson, un grand seigneur féodal breton, successeur du connétable de France Bertrand du Guesclin, fait construire un hôtel particulier au cœur du chantier du Temple, aujourd'hui le Marais. On ne conserve de ce premier habitat que la porte d'entrée fortifiée cantonnée de deux échauguettes sur l'actuelle rue des Archives. Il s'agit là de l'unique vestige de l'architecture privée du XIVe siècle encore visible à Paris.

    Au-dessus de la porte d'entrée, un tympan qui mériterait peut-être un petit toilettage... Cela permettrait d'y admirer les deux blasons (l'un sur la gauche étant celui des Guise, l'autre sur la droite que je n'ai pas pu identifier) qui le décorent.

    Photoshop n'a pas pu faire mieux...

    ☻ Visite de l'Hôtel de Soubise avec Générations 13 et l'association Paris Art et Histoire

    Au-dessus de la porte, deux écus sculptés dans la pierre sont reliés par un phylactère portant le mot, aujourd’hui quasiment illisible, « pour ce qui me plaist ».

    Ils encadrent un M : est-ce la M de Marie, en référence à la Vierge, ou celui de Marguerite de Clisson, fille d'Olivier... ? Le doute subsiste.

    En 1553, François de Lorraine, duc de Guise, et sa femme, Anne d'Este, acquièrent l'hôtel particulier.

    Très délabré, le bâtiment exige d'importants travaux de reconstruction que la puissante famille des Guise confie au célèbre artiste italien, chef de file de la première école de Fontainebleau, Francesco Primaticcio, dit Le Primatice.

    Rien n'a malheureusement été conservé des célèbres peintures de la chapelle réalisées d'après ses dessins par Niccolo dell'Abbate. Sous l'influence du Duc de Guise, l'hôtel devient le siège de la Ligue catholique pendant les guerres de religion. C'est le cadre d'événements marquants de l'histoire de France : le massacre de la Saint Barthélémy y est probablement décidé en 1572 ainsi que la journée des barricades, en 1588, qui oblige le roi Henri III à quitter Paris.

    Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, Marie de Guise, dite Mademoiselle de Guise, dernière descendante du nom, embellit considérablement l'hôtel et ses jardins. L'hôtel de Guise devient alors un haut lieu de rencontres pour la noblesse parisienne : s'y côtoient, en habitués, CorneilleTristan L'Hermite ou le compositeur Marc-Antoine Charpentier.

     ◄►◄►◄►◄►◄►

    Après le décès, sans héritier direct, de la maîtresse de lieux en 1688, ses héritières décident de vendre le bâtiment à François de Rohan-Soubise et son épouse, Anne-Julie de Rohan-Chabot. Ceux-ci confient à leur architecte, le jeune Pierre-Alexis Delamair, le soin de le remettre au goût du jour. J'ai lu sur le net qu'Anne de Rohan-Chabot aurait été, un temps, la maîtresse de Louis XIV et que cet achat y serait lié.

    Ha ha ha... Je fais mon Closer, juste histoire de s'amuser !

    C'est sur la rue des Francs-Bourgeois que va s'ouvrir la nouvelle façade de l'hôtel particulier. Juste en face, on peut apercevoir entre deux immeubles situés au 57-59, les vestiges de l'ancienne enceinte de Philippe-Auguste sous la forme d'une tour, la Tour Pierre Alvart, dont seule la base date de l'époque du Roi de France.

    L'architecte Delamair décide de changer l'orientation de l'édifice en plaquant une nouvelle façade de style classique contre l'ancienne aile sud. Il construit, à l'emplacement de l'ancien manège des Guise, une majestueuse Cour d'Honneur à portique arrondi ouvrant par une demi-lune sur la rue des Francs-Bourgeois. L'abondant décor sculpté qui l'ornait (cf. photo ci-dessous) a disparu en 1793.

    Vue de l'entrée de l'Hôtel de Soubise vers 1750 d'après Jacques Rigaud

    L'entrée actuelle des Archives Nationales

    La Cour d'Honneur côté rue des Francs-Bourgeois

    Un péristyle constitué d'une série de double colonnes à chapiteaux composites est surmonté d'une balustrade ajourée : le projet de l'architecte était d'en faire un lieu de promenade mais il n'a pas abouti.

    Les chapiteaux sont dits "composites" car ils allient les deux rangées de feuilles d'acanthe du style corinthien aux volutes du style ionique.

    Ces colonnes jumelées se continuent sur la façade de l'Hôtel décoré d'un avant-corps central à double colonnes superposées.

    Les figures de La Gloire et de La Magnificence, à demi-couchées, et les deux groupes d’enfants symbolisant Les Génies des Arts surmontent le fronton dont les décors aux armes des Rohan-Soubise ont disparu à la Révolution.

    C'est Robert Le Lorrain (1666-1743) qui est chargé de sculpter les statues représentant les quatre saisons qui ornent le premier étage de l'hôtel.

    L'allégorie du Printemps est accompagnée d'un angelot qui cherche à attraper la guirlande de fleurs...

    Tandis que dans L'Eté, il se cache malicieusement derrière Cérès, la déesse de l'agriculture, brandissant sa faucille.

    L'allégorie de l'Automne tient une grappe de raisins dans la main gauche et une coupe de vin dans la droite.

    L'Hiver enfin, est représenté par un vieillard enveloppé dans une cape, avec un angelot se réchauffant les mains au-dessus d'un brasero à ses pieds. 

    Dans le même temps, l'architecte Delamair est chargé par le futur cardinal de Rohan (celui du "Collier de la Reine"), fils de François de Rohan-Soubise et d'Anne-Julie de Rohan-Chabot, de construire un autre Hôtel particulier qui s'appellera l'Hôtel de Rohan-Chabot.

    Sa façade monumentale se dresse sur les jardins communs aux deux hôtels.

    Le remariage en 1732 d'Hercule Mériadec de Rohan-Soubise, âgé de 63 ans, fils aîné de François de Soubise, avec la jeune princesse Marie-Sophie de Courcillon, seulement âgée de 19 ans, est l'occasion de confier à un nouvel architecte, Germain Boffrand, l'aménagement des appartements.

    Marie-Sophie de Courcillon par Jean-Marc Nattier

    Trop belle, non ?

    En 1735, Boffrand édifie un nouveau pavillon, de forme ovale, qui permet l'articulation avec l'aile nord en retour et dessert les appartements privés du prince héritier et de son épouse. À partir de 1736, il consacre tous ses efforts aux décors intérieurs. Ces appartements comptent parmi les plus beaux exemples de l'art rocaille, chef-d'œuvre collectif dû au talent des meilleurs peintres, sculpteurs et ornemanistes du temps – François Boucher, Charles Natoire, Jean-Baptiste II Lemoyne, Jacques Verbeckt, etc. – réunis sur le chantier autour de Boffrand.

    Vous en avez assez des descriptions extérieures ? C' est bien normal.

    Alors, entrons !

    Dans le vestibule d'entrée, une maquette de l'hôtel

    Avec un plan, c'est plus clair !

    Le N°1 c'est l'Hôtel de Soubise ; en N° on a l'Hôtel de Rohan : les deux hôtels ont été construits par Delamair et affichent, par la forme de leur cour, un petit air de ressemblance. Les autres numéros sont d'autres hôtels particuliers donnant sur la rue des Francs-Bourgeois. En N°7, le CARAN (Centre d'Accueil des Archives Nationales).

    Nous commençons par visiter le rez-de-chaussée, étage qui était réservé au Prince de Soubise. Des peintures des plus grands peintres du siècle de Louis XIV (François Boucher, Charles-Joseph Natoire ou bien Carl Van Loo) ornent magnifiquement les pièces de l'Hôtel.

    Nous voici ici dans la chambre du Prince qui possède une alcôve tendue d'un riche tissu cramoisi.

     Ici, les peintures sont mises en valeur par des cadres en bois doré superbement sculptés : elles représentent des scènes mythologiques.

    Hélas, trois fois hélas, mon ami internet ne m'a pas renseignée sur tous leurs thèmes et comme vous le savez peut-être j'ai une mémoire de poisson rouge !

    Je pense tout de même ne pas dire trop de bêtises en nommant cette peinture L'Hymen d'Hercule et d'Hébé (Pierre-Charles Trémolières).

    et cet autre Neptune et Amphitrite de Jean Restout

    Mars et Vénus de Carl Van Loo

    Il ne faut pas oublier de souligner les superbes moulures qui décorent murs et plafond.

    Ici, les armoiries de la Bretagne dont est originaire la famille de Rohan-Soubise : une hermine au centre encadrée par deux lions, surmontée d'une inscription latine Malo mori quam foedari : mieux vaut mourir qu'être déshonoré.

    Monsieur Obel nous fait aussi remarquer cette très belle pendule ornée de deux angelots.

    En quittant la chambre pour rejoindre la pièce suivante, nous passons à côté de la petite porte dissimulée dans une moulure donnant accès à l'escalier "secret" montant à l'étage de la Princesse...

    Nous voici maintenant dans le Cabinet des livres du Prince de Soubise, une toute petite pièce donnant sur la Chapelle de l'Hôtel.

    Aux angles de la pièce, deux peintures décoratives peintes en camaïeu de bleu, par François Boucher, illustrent La Pêche et La Chasse.

    Nous arrivons ici dans une pièce qui a la particularité d'être octogonale à l'extérieur mais ovale à l'intérieur : on l'appelle d'ailleurs le Salon ovale.

    Beaucoup de sobriété ici : cette harmonie plutôt neutre est seulement perturbée par les dorures des grands miroirs, auxquelles s’ajoutaient autrefois celles des meubles précieux.

    L’un des bras de lumière du salon ovale de l’appartement d’apparat du prince. Vous remarquerez qu'on n'y trouve aucune symétrie contrairement à la coutume.

    Les huit reliefs en plâtre des voussures du salon ovale, moulés et repris au ciseau, présentent des figures allégoriques, très largement consacrées aux arts et aux sciences.

    Pour L’Histoire de Lambert-Sigisbert Adam, le sculpteur a mis en scène la muse Clio, s’apprêtant à compléter le grand livre de l’Histoire, soutenu par Chronos (le Temps), alors qu’une figure de la Renommée souffle dans sa trompette.

    L'Histoire et La Musique de Adam également (peut-être ?)

    Le grand Cabinet du Prince

    Au-dessus de la porte, une peinture représentant Neptune et Mercure

    Sur le chevalet, un portrait du Prince de Soubise

    La visite des appartement du Prince terminée, nous montons visiter ceux de la Princesse à l'étage. Reconstruit sous Louis-Philippe, l’actuel escalier d’honneur est ornée d’une peinture "plafonnante", réalisée par Félix Jobbé-Duval en 1877-1881.

    Elle représente La France attachant ses archives à la nuit des temps.

    Vue sur la Cour d'Honneur depuis le premier étage

    Nous traversons rapidement une petite pièce, naturellement ornée de très jolis dessus-de-portes...

    Il me semble qu'ici il s'agit de l'histoire de Psyché et Aphrodite.

    Psyché est si belle qu'elle éveille la jalousie d'Aphrodite. Paradoxalement, elle ne trouve pas d'époux. Pour se venger, la déesse demande à Eros, son fils et dieu de l'Amour, de la rendre amoureuse du mortel le plus méprisable qui soit. Mais voilà qu'Eros lui-même en tombe amoureux. L'histoire se complique...

    Monsieur Obel nous a raconté ainsi toutes sortes de belles légendes issues de la mythologie.

    Nous entrons ensuite dans la Chambre d'Apparat de la Princesse de Soubise qui est somptueusement décorée. Le rouge cramoisi fut choisi pour les tissus ; le blanc et l’or, pour les boiseries. Le lit de parade à impériale trônait dans l’alcôve, réservée au rituel princier et délimitée par une balustrade dorée.

    Le plafond est orné d'une splendide rosace mettant en valeur le gros lustre en cristal de roche.

    Plus nous progressons, plus il y a de l'or...

    Les médaillons ovales des lambris de hauteur et des parcloses encadrant les trumeaux de glace, exécutés par le fameux Jacques Verbeckt et son équipe d’ornemanistes, illustrent, d'une part, des scènes mythologiques, et d’autre part, les attributs des Sciences, des Lettres et des Arts. Ce second thème renvoyait bien sûr à la formation intellectuelle de la Princesse de Soubise et à son désir de paraître en femme d’esprit.

    Parmi les sujets illustrant les aventures amoureuses de Jupiter, Verbeckt réalisa L’Enlèvement d’Europe : la légende, tirée des Métamorphoses d’Ovide, rappelle que Jupiter séduisit la princesse Europe, fille d’Agénor, roi de Tyr (Phénicie), sous la forme d’un taureau blanc. Attirée par l’odeur d’un crocus qui se trouvait dans la gueule du taureau, la princesse chevaucha l’animal ; celui-ci partit sur les flots, jusqu’à l’île de Crête, où il reprit forme humaine pour parvenir à ses fins.

    Le "clou" de l'Hôtel, si tant est qu'il faille décerner un prix à l'une de ces pièces toutes plus belles les unes que les autres, est le Salon ovale de la Princesse.

    Plusieurs personnes y sont installées sur des chaises pour dessiner.

    Quoi ? Sans doute les Amours qui animent le plafond.

    Cette pièce est un vrai chef-d'œuvre de l'art "rocaille". Evidemment, c'est un peu chargé mais avouez que ça en jette et le Prince de Soubise a besoin d'en mettre "plein les yeux" de sa jeune épouse âgée de 44 ans de moins que lui...

    Le grand lustre en cristal de roche qui y est accroché met en lumière les peintures et fait étinceler les dorures, qui se dédoublent dans les miroirs.

    Ces Amours sont vraiment charmants avec leurs divers accessoires en main (arc, carquois, oiseaux, corbeille de fleurs, thyrse).

    Le Salon ovale renferme l’ensemble de peintures le plus important de la campagne de travaux menée par Germain Boffrand. L'architecte confie l'exécution de celles-ci à Charles-Joseph Natoire qui veille à ce qu'elles s’intègrent harmonieusement au décor en les plaçant dans des cadres trapézoïdaux réservés au sommet de chaque panneau de boiserie. Ils forment un ensemble cohérent avec la sculpture ornementale et les stucs.

    Psyché découvre l'amour endormi (1738) par Charles-Joseph Natoire (1700-1777)

    Ici, le peintre illustre l'épisode où Psyché, appréciant les étreintes nocturnes de son mystérieux amant et piquée par la curiosité, approche une lampe à huile du visage de Cupidon laissant tomber une goutte d'huile sur sa cuisse et le faisant fuir.

    Rassurez-vous la mythologie se rapproche ici des contes de fées et l'histoire se terminera par un mariage...

    Au centre de la pièce, une table qui a une histoire.

    Notre guide nous explique que c'est celle sur laquelle Robespierre fut allongé alors qu'il avait été blessé dans la nuit du 9 au 10 Thermidor de l'an II.

    Robespierre blessé - chromolithographie de la fin du XIXe siècle

    Robespierre y agonisa dans l'antichambre du Comité de Salut Public (au Louvre) avant d'être guillotiné le lendemain.

    On peut y voir qu'aux quatre angles, les symboles de la Monarchie (à l'origine cette table, fabriquée en 1744, était celle du Cabinet de travail du Roi au château de Choisy)  ont été remplacés par le bonnet phrygien révolutionnaire.

    Au regard du Salon ovale, cette petite chambre des appartements privés de la Princesse semble bien modeste et pourtant elle est décorée de peintures de prix.

    Dans cet espace par lequel nous terminerons notre visite, un plan de Paris et de ses faubourgs réalisé pour Turgot, le prévôt des marchands, entre 1734 et 1739 par Louis Bretez, membre de l'Académie de Peinture et de Sculpture et professeur de perspective.

    Il a la particularité de nous montrer la capitale sous une orientation qui n'est pas habituelle, celle utilisée par les plans du XVIe siècle, qui utilisent la Seine comme un axe vertical de symétrie. Il couvre approximativement les actuels onze premiers arrondissements. Ainsi, le quartier du Gros Caillou (que certains d'entre vous ont déjà visité avec Anne-Marie), situé de nos jours entre la Tour Eiffel et les Invalides, se retrouve-t-il en bas à droite de la carte.

    Cliquez sur la carte pour l'agrandir.

    En face du plan de Turgot, une table qui elle aussi a une histoire puisque c'était le bureau de Mirabeau.

    Idem pour ces petits tabourets qui appartenaient sans doute au Comité de salut public.

    La dernière pièce est sombre...

    On peut y voir un "crochet", sorte de diable permettant aux archivistes de porter de lourdes charges.

    Sous la Révolution, l'hôtel de Soubise est mis sous séquestre puis finalement vendu au profit des créanciers de la famille de Soubise, à l'instar de son voisin l'hôtel de Rohan. Par le décret impérial du 6 mars 1808, il est acquis par l'État et officiellement affecté aux Archives de l'Empire. Au même moment, l'hôtel de Rohan est attribué à l'Imprimerie nationale.

    Dans l'ancien hôtel de Soubise, Napoléon Ier fait regrouper les archives qui étaient jusqu'à présent conservées dans plusieurs dépôts parisiens. Cependant, ces espaces, provisoires et inadaptés, deviennent vite surchargés et l'administration doit engager un programme de construction de dépôts ad hoc. La plupart des documents des Archives Nationales se trouvent maintenant à Pierrefitte-sur-Seine.

    Comme toujours, Monsieur Obel nous a gâtés en ne nous faisant grâce d'aucun détail concernant ce superbe Hôtel particulier. Nous devrions être fortiches en mythologie maintenant... Reste à intégrer tout ça !

    Merci à lui pour cette visite très fouillée, et à Anne-Marie qui a organisé la sortie.


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  • Vendredi dernier, Michel Duffau a organisé et guidé une balade dans Paris dans le cadre des "Petites promenades" de Générations 13.

    Au programme, le quartier de la Madeleine. Ce n'est pas tous les jours que je me propulse dans les beaux quartiers et, en cette période proche de Noël, je n'ai pas été déçue par les vitrines qui rivalisaient toutes de beauté.

    Le rendez-vous nous avait été donné derrière la Madeleine et, tout comme hier pour la balade avec Anne Viala, le soleil était au rendez-vous.

    Une chance !

    Le quartier de la Madeleine a d'abord été un domaine agricole concédé à l'évêque de Paris par le roi Dagobert Ier. A partir du XVIe siècle, un faubourg appelé La Ville-l'Evêque s'y est développé. La construction de l'église, commencée en 1757, ne sera achevée que sous le règne de Louis-Philippe, en 1812. Son aspect de temple grec lui a été donné par Napoléon qui voulait en faire un Temple de la gloire dédié à la Grande Armée.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Il y a maintenant, autour de l'église, de forts jolis bancs arrondis dont certains sont même associés à une "tablette" permettant de croquer son sandwich ou de taper le carton. Ils sont inspirés des anciens bancs "Adolphe Alphand".

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    C'est là que la quinzaine de participants a retrouvé Michel qui nous propose ce jour une marche d'environ 2h-2h30 dans l'un des plus élégants quartiers de Paris.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Michel nous montre tout de suite d'anciennes toilettes publiques souterraines de Style Art nouveau qui, fermées depuis 2011, vont être restaurées dans leur état d'origine d'ici à la fin de l'année 2022.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Ce sont les célèbres établissements Porcher qui les ont réalisées en 1905 sur le modèle des anciens "Lavatories" anglais. L’escalier qui y mène était décoré d’une mosaïque à motifs floraux. A l’intérieur, il y avait des toilettes pour hommes, des toilettes pour femmes et une loge de gardien.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Les voici tel qu'elles étaient du temps de leur splendeur.

     Les boiseries et portes sont en acajou. Les vitraux des portes des cabines représentent de motifs floraux. Des carreaux de céramique blancs ou à motifs de fleurs recouvrent les murs. Une chaise surélevée sur une estrade est destinée au travail du cireur de chaussures.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Nous voici arrivés sur le devant de l'église et j'y remarque de très beaux porches d'entrées : ils ont été réalisés par l'architecte Théodore Charpentier. Celui-ci, situé au numéro 3, a abrité le styliste Nino Cerruti qui y a installé sa maison de haute couture en 1967 ; on y voyait à l'époque Alain Delon et Jean-Paul Belmondo.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Le "clou" du quartier, c'est cette longue façade, sise au numéro 9, qui fait l'angle de la place avec le boulevard Malesherbes. Elle est également l'œuvre de Théodore Charpentier.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    C'est en effet ici que prend la Galerie de la Madeleine, dans laquelle nous ne rentrerons pas mais on se doute qu'elle abrite des magasins de luxe.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Les caryatides sont l'œuvre du sculpteur Jean-Baptiste-Jules Klagmann.

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    Depuis 1924 l'immeuble abrite un restaurant gastronomique "Lucas Carton".

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    L’inauguration officielle du restaurant date de la construction de l’immeuble par Théodore Charpentier en 1839. Il devient vite l'endroit couru du tout Paris de Napoléon III. En 1880, il est décoré de boiseries par Louis Majorelle qui en font un chef-d'œuvre de l'Art nouveau (les travaux ont duré quatre ans tout de même). Tout d'abord appelé "Lucas", il prend son nom définitif entre les deux guerres quand Monsieur Carton en fait l'acquisition.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Michel nous montre une photo de l'intérieur, plutôt "chicos"...

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Pas la peine de rêver, Mesdames, nous ne sommes ici que de passage !

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Rien que cette asperge à la "Lucas Carton" en dit long sur l'élaboration des plats...

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

     

    Traversant la rue Royale, Michel nous fait remarquer le bel alignement entre les façades de temple grec de l'Assemblée nationale et de l'église de la Madeleine. Je n'ai pas pris de photo car à cet endroit la circulation est intense.

     Nous restons dans le luxe avec ce passage très chic "Le Village Royal" faisant communiquer la rue Royale avec la rue Boissy-d'Anglas. Autrefois, il y avait ici une caserne de mousquetaires.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    A l'angle, une boutique Dior a élu domicile.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    On entre ?

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Toujours Dior

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Façade côté rue Royale

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Façade côté Rue Boissy-d'Anglas

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    La rue du Faubourg Saint-Honoré a déjà revêtu ses habits de fête (des guirlandes de sapin en lieu et place des guirlandes de lumières), économies d'électricité obligent peut-être... ?

    Ici, la Maison de beauté Carita qui occupe tout un immeuble.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Dans le boulevard de la Madeleine, cet immeuble qui fait l'angle avec la rue Vignon est celui de l'ancien Hôtel de la Compagnie des Messageries maritimes. Construit en 1924, il se distingue par son porche d'entrée Art-Nouveau en forme de coquillage.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Côté rue Gaudot-de-Mauroy, il affiche un bas-relief en forme de blason maritime représentant des ancres et un gouvernail.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    De l'autre côté du boulevard, au numéro 7, une jolie façade également datant de 1910, celle de la Compagnie d'Utrecht. Il fut construit pour la compagnie d'assurance Utrecht vers 1910.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    La façade comporte des éléments " Art Nouveau " remarquables dont une mosaïque polychrome ceinturant la corniche.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Il s'agit ici de l'ancien Hôtel de La Haye. Mirabeau y aurait habité en 1789.

     Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    On dirait bien que les bas-reliefs en pierre représentent des instruments de musique.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    L'immeuble situé en face, construit en 1785 par Auber, est lui aussi mis en valeur par sa forme ronde. S'y ajoutent de superbes balcons en fer forgé.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Il s'agit de celui du très célèbre Olympia de Bruno Coquatrix ouvert en 1954 et rénové en 1997. Gilbert Bécaud y fait ses débuts. Tous les grands de la chanson se produisent alors sur cette scène devenue mythique : Georges Brassens, Jacques Brel, Léo Ferré, Edith Piaf, Juliette Gréco, Barbara, Johnny Hallyday etc.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Nous voici maintenant arrivés sur le boulevard des Capucines : ici se trouve le musée-théâtre du parfum Fragonard. Il expose des alambics, des flacons de laboratoire, des pots-pourris et des torréfacteurs de parfum, ainsi que les animaux et les plantes qui fournissent les matières premières pour la parfumerie. Une collection de flacons de parfum illustre 3 000 ans de fabrication.

    Il serait fermé temporairement...

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    A deux pas de l'Opéra, aux numéros 27-29, un immeuble affiche une splendide façade Art nouveau largement vitrée. Un hôtel-restaurant 5 étoiles, le Kimpton St Honoré, s'y est ouvert en août 2021.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    En 1914, c'est l’architecte belge Frantz Jourdain qui signe la construction de cet immeuble Art nouveau, avec sa façade ouvragée habillée d’une trame de métal turquoise, ornée de motifs floraux stylisés. Le lieu abritera à partir de 1917 et ceci jusque dans les années 1980 le grand magasin «La Samaritaine de Luxe».

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    La façade s’anime de garde-corps aux motifs floraux, de colonnettes en cuivre aux chapiteaux végétalisés, de bandeaux de mosaïques représentant des lianes de capucines et des hortensias bleus.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Le bas de l'immeuble est orné d'une fresque en fer forgé des plus jolies.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Michel nous a fait le cadeau de nous laisser rentrer dans le hall - avec autorisation de la Direction - bien qu'étant en groupe et... ça valait le coup d'œil !

    L'un des deux ascenseurs est équipé d'un fauteuil et d'une table basse s'il-vous-plait des fois qu'on y reste plus de quelques minutes !

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    A côté de l'autre ascenseur, le grand escalier et sa rampe en fer forgé ont été conservés.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Je ne résiste pas à vous montrer cette salle de restaurant donnant sur la cour intérieure végétalisée,

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    ni à vous faire monter virtuellement sur le roof-top... (photos "Sortir à Paris"),

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    On redescend sur terre mais juste un instant puisque nous voici face à un autre 5 étoiles, l'Hôtel Scribe (de la chaîne Sofitel) qui fait l'angle du boulevard des Capucines avec la rue du même nom.

    Nous ne le visiterons pas !!!

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

     Le groupe emprunte maintenant la rue Edouard VII nommée ainsi en l'honneur du roi anglais Edouard VII qui était fou de la Capitale française et de ses divertissements. C'est ainsi qu'il décida d'offrir à la ville une salle de spectacle consacrée au cinéma. Elle a été construite en 1913 par l'architecte anglais Sprague.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Ce sera le théâtre Edouard VII-Sacha Guitry où le célèbre acteur se produisit à partir de 1920.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Une statue équestre du Roi lui fait face.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Michel nous montre quelques photos.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Celle-ci représente le souverain portant un manteau fabriqué dans le fameux tissu "Prince de Galles".

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    D'un théâtre à l'autre : celui-ci est le théâtre de "l'Athénée"-Louis Jouvet situé dans le square de l'Opéra-Louis Jouvet. L'acteur, qui fut successivement machiniste, costumier, accessoiriste, peintre et éclairagiste, dirigea le théâtre de 1934 à 1951, date de sa mort.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    La devanture du théâtre (construit en 1896), dans un style Art nouveau d'inspiration orientale, est celle de l’ancienne façade du théâtre de la Comédie parisienne construit en deux ans auparavant au même endroit. 

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Sur la place, une très jolie sculpture représente "Le Poète chevauchant Pégase". Elle est l'œuvre d'Alexandre Falguière (1896).

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Derrière le monument, le musée du parfum Fragonard

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Faisant l'angle de la rue des Mathurins, les anciens Bains Turcs de Paris. Il s’agit là de l’unique vestige d’un célèbre établissement de bains installé ici dans le dernier quart du XIXe siècle qui ne ferma qu'en 1954.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Après sa fermeture, une rénovation complète a fait disparaître tous les décors intérieursne laissant subsister que la façade. Je n'ai trouvé que cette photo pour évoquer le passé...

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    L’affiche publicitaire qui est diffusée à l’époque détaille tous les services proposés aux clients : MassageSalles d’inhalation pour les deux sexes, Lavage et douchesÉtuves à air secPiscine d’eau de sourceUn Buffet-restaurant est également disponible, ainsi qu’un Trinkhalle (entendez buvette) fourni en différentes eaux minérales. En outre, les dames peuvent, après les méfaits causés à leurs cheveux par le bain de vapeur, se refaire une beauté au salon de coiffure de l’établissement.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Arrivés au boulevard Haussmann nous apercevons des gens qui contemplent la capitale depuis la terrasse du Printemps. Il faut dire que le temps s'y prête...

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Quoi de plus beau que ces coupoles dorées qui brillent au soleil !

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    "Au tortues" était le nom du magasin situé au 55 du boulevard Haussmann. Avec sa superbe devanture en bois sculpté, il fut créé en 1864, et la boutique reçut son décor en 1910. 

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Le décor en marbre de la façade actuelle, d’inspiration Louis XVI, daterait de 1910 et comporte deux têtes d’éléphant et deux tortues, réalisées en bronze. Les animaux sculptés rappellent sa destination première : la vente d’objets en ivoire et en écaille.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Nous terminons notre balade par la rue des Mathurins dans laquelle j'ai remarqué ce beau bow-window.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Passant devant le théâtre des Mathurins (en travaux) et le théâtre Michel, nous arrivons à un croisement que certains d'entre nous connaissent déjà pour y être venus guidés par Anne-Marie lors d'une autre promenade : c'est celui où se trouve cet immeuble Art déco appartenant aujourd'hui à une banque internationale. Il fut construit par Pierre et Alex Fournier pour abriter les locaux de la Société financière française et coloniale.

    On comprend mieux ainsi la présence de ces animaux exotiques (chameau, éléphant, crocodile, requin, tigre, serpent, ainsi que toutes sortes d'oiseaux et de poissons).

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    En face, se tient la Chapelle expiatoire. Il s'agit d'un ensemble religieux et commémoratif consacré aux victimes de la Révolution, notamment le couple royal, qui a été construit de 1815 à 1826 et est classé monument historique depuis le 22 juillet 1914.

    Petites promenades dans Paris : "autour de la Madeleine" avec Michel Duffau

    Là s'achève cette promenade architecturale.

    Un grand merci à Michel pour l'avoir organisée et guidée.

    C'était super !


    4 commentaires

  • Aujourd'hui, c'est la grève des transports mais heureusement la promenade préparée par Anne Viala dans le cadre de son atelier "Marches de 6 km" à Générations 13, se situe dans un périmètre atteignable à pied depuis la Butte aux Cailles et le beau temps m'accompagne... 
    Je rejoins ainsi la Porte d'Ivry à pinces et y retrouve la quinzaine de participantes à la promenade.

    Anne a choisi un thème pour cette marche :

    A l'approche de l'hiver, la société se penche sur les plus pauvres : 17 octobre, journée du refus de la misère initiée par ATD - Quart Monde et reprise par l'UNESCO, 13 novembre, journée mondiale des pauvres dans l'Eglise catholique, nombreux appels aux dons à l'approche des fêtes de fin d'année. La politique sociale du 13ème est forte du fait du fort pourcentage de gens modestes : logements sociaux, centres médicaux, centres d'accueil, associations. Ceci est vrai depuis longtemps et le fut beaucoup, en particulier, aux 19ème et 20ème siècles. 

    Anne nous montre, au numéro 16 de l'avenue d'Ivry, la plaque indiquant que les usines Panhard et Levassor ont démarré leur activité ici en 1891. C'était donc quelques trente ans après l'annexion d'une partie d'Ivry à la ville de Paris.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Contournant ce grand immeuble de briques rouges,

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    nous voici maintenant au 113 de la rue Regnault où se trouve l'entrée de L'Arche d'Avenirs. On aperçoit au loin la fresque Street-Art de la Joconde de l'artiste San Miguel Okuda au sein de la Villa d'Esté.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    L’Arche d’Avenirs est l’accueil de jour des Œuvres de la Mie de Pain. Labellisé "Espace Solidarité Insertion" (ESI) depuis 2006, il offre divers services de première nécessité aux personnes sans-abri : un espace hygiène (douches, buanderie) des consignes, un accès aux soins, un écrivain public...

    Dans ces nouveaux locaux depuis 2011, des activités d’animation et de remobilisation complètent l’accueil auprès d’un public très souvent dépourvu de réseau relationnel et affectif.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Chiffres-clés 2018

    • 54 548 passages (+13% par rapport à 2017)
    • 744 personnes domiciliées dont 44 nouvelles inscriptions en 2018
    • 1 312 personnes reçues en entretien par les travailleurs sociaux
    • 260 entretiens avec une psychologue
    • 2 500 kits d’hygiène distribués
    • 14 692 douches (88% d’hommes)

    Une partie du groupe devant l'entrée de l'ESI

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Passage devant Tang Frères où une fresque "Nostalgia" a été réalisée par l'artiste chinoise Satr : elle représente un tigre de Sibérie, animal totem du Nord-Est de la Chine, qui se repose sous un pin en regardant au loin. Une hirondelle survole la tête du tigre, comme si elle est en train de transmettre les pensées de ce dernier vers son pays d'origine, la Chine, qui manquait à l'artiste pendant son séjour en Europe.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Après qu'Anne ait demandé aux participantes leur choix pour rejoindre la rue Charles Fourrier, étape finale de cette ballade (passage par des squares ou par des rues), nous traversons le Jardin Baudricourt situé en face de chez Tang Frères.

    Une découverte pour moi qui habite pourtant le XIIIe depuis plus de vingt ans...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Le jardin, sur lequel donnent de grandes tours, est planté à cette époque de très jolis chrysanthèmes.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

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    Nous voici maintenant dans le Jardin de la Dalle d'Ivry, moins joli mais depuis lequel on aperçoit sur la gauche de la photo l'église Saint-Hyppolite, qui est également un centre social important du XIIIe arrondissement.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Quel contraste entre l'église en pierres meulières et cette grande tour de logements !

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Arrivés Avenue de Choisy, nous découvrons ce joli dragon qui nous rappelle que nous sommes ici en plein quartier chinois.

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    Ces travaux sont-ils ceux, gigantesques, du futur métro devant desservir l'aéroport d'Orly... ?

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    Juste en face, l'église Saint-Hyppolite, lieu de culte mais aussi d'accueil des plus défavorisés. Je ne prétends pas en parler aussi bien qu'Anne mais j'ai consulté ses notes et aussi mon ami internet...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Anne nous explique que le nom de l'église a été donné en remerciement du don du terrain qu'avait fait Hyppolite Panhard, le fils de René, au clergé. Par ailleurs, saint Hyppolite était un soldat romain martyrisé au IIIe siècle à cause de sa foi.

    Ici, le lundi matin  de 7h30 à 8h30, derrière cette porte, il y a possibilité de prendre un petit-déjeuner dans le "Petit Café".

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    Dans la cour de Saint-Hyppolite, il y a aussi le "Relais Fraternel" (autrefois il y avait une roulotte).

    Face à la crise sanitaire et à l’augmentation des personnes en situation de précarité, des paroissiens de Saint- Hippolyte se sont mobilisés pour créer l’association "Le Relais Fraternel" et ainsi distribuer des colis alimentaires à ceux qui sont dans le besoin. La première distribution a commencé le 28 novembre 2020.

    On peut y apporter le samedi entre 10h et 13h des denrées non périssables ou bien devenir bénévole pour assurer leur distribution.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Nous empruntons ensuite la rue des Malmaisons (qui doit son nom à celui d'un lieu-dit) et dont je ne donne pas cher dans un avenir plus ou moins proche...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Et rejoignons ainsi l'Avenue d'Italie où le marché se tient tous les jeudis.

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    On y trouve, au numéro 126, Ma Ressourcerie, une association citoyenne à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901. Il s'agit d'un magasin où l'on peut venir déposer des objets ou des vêtements dont on veut se séparer et qui sont revendus à petit prix.

    Sur leur site, on y apprend qu'une ressourcerie remplit quatre fonctions :

    - Collecter les objets dont vous ne voulez plus ou dont vous n’avez plus l’usage.
    - Remettre en circuit dans des espaces de seconde main des objets propres et en bon état
    - Transformer les matières invendables en nouveaux objets
    - Sensibiliser à la prévention des déchets et inciter le public à une consommation responsable et raisonnée.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Chemin faisant, nous voici arrivés sur la Place d'Italie, non loin de la Mairie du XIIIe. Anne nous y montre l'Avenue de la Sœur Rosalie.

    Cette avenue doit son nom à Jeanne Marie Rendu (1786-1856), dite Sœur Rosalie, qui fut célèbre au XIXe siècle pour sa charité envers les nécessiteux et les souffrants du quartier Mouffetard voisin, notamment durant les journées de Juillet 1830.

    En 1859, l'abbé Le Rebours achète un terrain dans l'avenue (qui se nomme alors "rue de Gentilly") et y fait construire une chapelle dédiée à la nonne. En 1867, la chapelle est détruite et transférée à l'angle de la rue Corvisart et de l'actuel boulevard Auguste-Blanqui : c’est maintenant l’église Sainte-Rosalie. L'église accueille parfois des chorales... Je fais partie de Chœur Choisy, la chorale du Club musical de La Poste dont le prochain concert aura lieu le 16 avril : publicité gratuite !!!

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    Au 55 de la rue Bobillot se trouve le Groupe Alliance Espérance.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    L’association Alliance-Espérance s’est développée petit à petit en fonction des besoins qui se sont fait sentir après l’ouverture du centre d’accueil. Elle rassemble aujourd’hui trois groupes d’associations aux objectifs complémentaires avec pour valeurs communes l’accueil, l’écoute, et l’aide à la réinsertion:

    "Alliance pour la Vie" gère les établissements "Abritoit" et la "Maison Marie-Louise", qui assurent un hébergement mais aussi un accompagnement social, éducatif et psychologique aux accueillies.
    L'ESAT "Regain-Paris" a pour mission l’aide à la réinsertion par le travail de personnes désocialisées et fortement marginalisées, avec un Établissement  de Service et d’aide par le travail.
    "Août Secours Alimentaire" reçoit et nourrit dans un cadre chaleureux des personnes défavorisées durant le seul mois d’août grâce à une action ponctuelle, mais aussi au fil de l’année avec "Les Compagnons de la Tour Saint-Jacques". Entre 1994 et 2006, le nombre de repas distribués chaque année durant le seul mois d’août est passé de 22.000 à 380.000, le nombre de personnes logées a été de plus de 200.

    Tout près de là, le Bar Billot, que je connais par amie interposée : il s'agit d'une imprimerie numérique tenue par les travailleurs de l’ESAT Regain Paris (l'imprimerie emploie des travailleurs en situation de handicap).

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Qui dit "Rue Bobillot" dit aussi "Rue Vandrezanne"... Au numéro 44, vous connaissez sûrement l'association Générations 13 et son slogan "Bien vivre ensemble pour mieux vieillir" qui prend soin des seniors !

    A côté, se trouve une crèche : au XIXe siècle c'était un asile de vieillards puis c'est devenu un foyer de consultation pour femme enceintes et pour leurs bébés (PMI).

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    L'église Sainte-Anne de la Butte aux Cailles fait l'angle entre la rue Bobillot et la rue de Tolbiac. Construite sur pilotis, elle souffre actuellement et ceci depuis plusieurs années de problèmes de stabilité : des travaux très importants ont été engagés afin de la stabiliser en renforçant les fondations de l'édifice. Anne nous apprend qu'à son emplacement, il y avait autrefois une roulotte : c'est l'histoire de Paulin Enfert.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    La Mie de Pain, créée par ce dernier et inaugurée en 1891, est située au 20, rue Charles Fourrier. Elle est bien connue des habitants du XIII : il s'agit d'une association de lutte contre la précarité qui accueille et accompagne les personnes en situation d'urgence. Elle propose chaque jour 360 places d'hébergements avec le couvert qui va avec.

    On pourrait dire qu'ainsi il devrait ne plus y avoir de "Sans Domicile Fixe" mais elle a des règles bien sûr que certains ne sont pas prêts à accepter et puis on y est parfois victime de vols la nuit : c'est du moins ce que j'ai entendu dire... Bref, elle ne résout pas tous les problèmes mais y contribue largement.

    Pourquoi ce nom de Mie de Pain ?

    Un volatile picorant des miettes de pain jetées à terre l'a inspiré...

    Une exposition se tient cette année dans les locaux de l'ARPE où la Mie de Pain a son siège social pour rendre hommage à Paulin Enfert dont on célèbre cette année le centenaire du décès.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Paulin Enfert âgé, toujours avec son nœud papillon...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

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    Paulin Enfert (1853-1922) a tout juste 17 ans lorsqu’éclate la guerre de 1870. Malgré son jeune âge, il s’engage pour défendre sa patrie. C’est donc en soldat qu’il vit le siège de Paris par l’armée prussienne, les bombardements, les rationnements et en fin de compte l’amertume cuisante de la défaite. Il est probable que sa vocation de chrétien au service des plus humbles soit en partie due aux événements de la Commune qui l'ont beaucoup marqué.

    Après son service militaire, Paulin Enfert a été prestidigitateur, peut-être même l'élève de Robert Houdin ? Un art qui lui servira par la suite auprès des jeunes.

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    A 29 ans, il entre comme employé au sein d'une grande compagnie d'assurances et restera célibataire, ce qui le servira en lui permettant de se donner pleinement à ses oeuvres de charité. IL constate en effet que l'industrialisation détruit les emplois et plonge de nombreuses familles dans la misère, touchant en particulier les enfants qui ne sont pas scolarisés malgré la loi et qui sont ainsi livrés à eux-mêmes.

    Vue de la Colonie de la Butte aux Cailles : ça ne respire pas l'opulence...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Famille de tanneurs au bord de la Bièvre dans le XIIIe

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Sur un grand terrain de 2000 m² offert par un riche donateur, Jules Nolleval, il crée un patronage pour les jeunes (le patronage Saint-Joseph de la Maison-Blanche), des salles de classe et d'apprentissage, introduit le catéchisme, crée une salle de spectacle qu'il anime lui-même, envoie les enfants en colonie de vacances etc., le tout sur la base du bénévolat.

    Au début, une roulotte lui sert d'abri...

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Quant à l'église Sainte-Anne, c'est le chocolatier Lombart qui en finança la construction : on appelle la façade de Sainte-Anne la "façade chocolat" !

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

     

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Jules Lombart et sa femme Honorine, ont donné leur nom aux deux clochers de l'église, Julius et Onorina, à moins que ce ne soit aux deux cloches... ?

    ☻ Promenade dans le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Le plan du XIIIe du temps de la Bièvre

    Le XIIIe arrondissement social avec Générations 13

    Une balade bien intéressante

    Un grand merci à Anne pour l'avoir organisée et guidée. 


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