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Par Vandrezanne44 le 4 Octobre 2024 à 19:00
A l’aube du XIXe siècle, l’eau potable de qualité fort douteuse était distribuée avec parcimonie aux fontaines de Paris.
Napoléon Bonaparte, alors Premier Consul décide en 1802, de mettre fin à cette situation afin d’éviter les épidémies dues aux mauvaises conditions d’hygiène. Gaspard de Chabrol, le préfet de la Ville de Paris propose que l’on reprenne le projet de canalisation de l’Ourcq datant du XVIe siècle, plus deux canaux : Saint Denis et Saint Martin. Première fonction : éviter la boucle de la Seine. Le projet des trois canaux aboutira finalement en 1825.
Le canal Saint Martin est donc un canal navigable et un apport d’eau potable.
Le but des canaux Saint Denis et Saint Martin est aussi d'éviter aux bateaux naviguant sur la Seine la boucle du fleuve à la sortie de Paris.
Le canal Saint Martin mesure 4,5 km du bassin de la Vilette jusqu'à son embouchure dans la Seine. La dénivellation entre ses deux extrémités est de 25 m d’où les 9 écluses qui permettent de le franchir.
Sur les 4,5 km, 2 sont souterrains. En 1860, sous Napoléon III, le canal est couvert au niveau de l’actuel boulevard Richard Lenoir. Les troupes basées dans les casernes de l’actuelle Place de la République pouvaient ainsi accéder facilement au Faubourg Saint Antoine à la population frondeuse.
La promenade commence au square Frederick Lemaître.
Frederick Lemaître (1800 1876) était un acteur des théâtres populaires du boulevard du Temple. Son personnage a été incarné par Pierre Brasseur dans les « Enfants du Paradis ».
Derrière le buste de l’acteur nous apercevons le canal avant qu’il ne disparaisse sous la voûte du Temple. Au fond, la passerelle de la Douane.
Passerelle Alibert
Passerelle Richerand
Le pont tournant de la Grange aux Belles avec la passerelle Arletty à côté.
C’est à côté de cette passerelle que dialoguent les personnages joués par Arletty et Louis Jouvet dans le film « Hôtel du Nord » (Marcel Carné 1938).
Photo du groupe du 18 juin devant le célèbre hôtel
Avant d’être un film, « L’hôtel du Nord » fut un roman d’Eugène Dabit (1898 1936) dont les parents tenaient justement cet hôtel. Eugène, logé chez eux se fit, parfois, portier de nuit, observant les gens à leur passage, ce qui l’inspira pour ses futurs romans.
Voici la description qu’il fait de l’hôtel.
« C’est une vieille bâtisse faite de carreaux de plâtres et de vieilles charpentes, où vivent des camionneurs, des mariniers, des maçons des charpentiers, des employés, de jeunes ouvrières. Une soixantaine de personnes qui quittent l’hôtel le matin, vers sept heures et n’y rentrent que le soir pour dormir. Ils occupent des chambres ternes et exigües, froides l’hiver, étouffantes l’été ; les couloirs sont humides, l’escalier rapide. »
Le canal Saint Martin a inspiré d’autres artistes, ainsi le dessinateur Tardi :
Dans les aventures de Nestor Burma
Et celles d’Adèle Blanc-Sec
Le groupe du 4 octobre sur la passerelle Arletty
Cité Clémentel au 174, quai de Jemmapes
Edifiée en 1933 sous l’impulsion d’Etienne Clémentel plusieurs fois ministre sous la 3e République. Elle regroupait 430 ateliers d’artisans tous équipé d’eau, électricité, chauffage central et téléphone. L’époque était alors aux ambitions philanthropes et collectivistes.
La fin de la promenade ne présente plus beaucoup d’intérêt.
Place Stalingrad, face au canal : les quatre cardinales du sport célèbrent les futurs Jeux Olympiques.
La rotonde de Ledoux
Un des quatre survivants des bureaux d’octroi où des taxes étaient perçues sur les denrées qui entraient dans Paris.
C’est une autre histoire que nous évoquerons dans une prochaine promenade consacrée à l’ancien village de La Villette.
Sources : Le long de la Seine et du canal Saint Martin par : Claudine Hourcadette, Sophie Marguerite, Serge Montens (Editions Claire Bonneton)
Crédit photos : Monick L’avenir, Google
1 commentaire -
Par Vandrezanne44 le 2 Juin 2024 à 10:38
Dans le cadre des "Petites promenades dans Paris", Anne-Marie Guérin a conduit le 14 Mai la troisième partie du parcours "Ponts de Paris, cette fois du Pont Neuf au Pont de l'Alma.
Le texte est d'Anne-Marie Guérin, les images de Monick Lavenir et Internet.
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Par Vandrezanne44 le 21 Mai 2024 à 23:00
Anne-Marie , comme vous le savez, anime régulièrement les "Petites promenades dans Paris" de notre association. Elle nous a donné rendez-vous ce mardi à la station de métro "Palais Royal - Musée du Louvre" pour cette promenade dans le 1er arrondissement de la capitale.
Le temps a l'air d'être propice à la balade, chic !
La bouche de métro, côté Place Colette, est l'œuvre de Jean-Michel Othoniel (inauguration en octobre 2000) : il s'agit de perles de verre coloré enfilées sur une structure d'aluminium. On ne voit ici que le côté "nuit".
Un peu plus loin sur la rue Saint-Honoré, l'immeuble "Bons enfants" du Ministère de la Culture et de la Communication (2004-2005), enveloppé d'une résille d'acier par Francis Soler, se voit de loin. Sa couleur argentée tranche sur les façades classiques en pierre de taille qui l'entourent. Les entrelacs de métal découpés au laser s'harmonisent avec les toits de zinc des immeubles haussmanniens.
De l'art nouveau à retardement : très joli, non ?
Mais j'aimerais savoir comment on fait les carreaux ? Une question on ne peut plus terre à terre qui ne peut être posée que par une femme hélas : je vois toujours le côté pratique d'abord !
Personne ne se doute que cette structure est en réalité la transposition d’un tableau de la Renaissance italienne que l’architecte avait admiré dans le Palais de Té à Mantoue en Italie. Francis Soler a choisi le tableau de Guilio Romano "Le banquet des Dieux" dans la salle de Psyché, et l’a transmis sur ordinateur afin de distordre son dessin. Par la suite, l’image manipulée est imprimée sur des plaques d’acier et découpée au laser avant d’être montée sur la façade des deux immeubles.
Vive l'intelligence artificielle !
Le drapeau français flotte sur l'immeuble de bureaux vu ici du côté de la rue des Petits-Champs.
Notre premier passage couvert est la Galerie Véro-Dodat dont une issue donne sur la rue du Bouloi et l'autre sur la rue Jean-Jacques Rousseau. La galerie, ouverte en 1826 en lieu et place d'un ancien hôtel particulier, porte les patronymes de Benoît Véro et de François Dodat, deux charcutiers enrichis (le premier rue Montesquieu, le second rue du faubourg Saint-Denis), devenus promoteurs et associés pour l'ouverture de ce passage.
De chaque côté de la galerie, un arc en plein cintre flanqué de pilastres ioniques, le tout couronné d'un balcon. Chacune de ses deux entrées est équipée de grilles pour la fermeture.
Dans la façade donnant sur la rue du Bouloi, deux statues en pied posées dans des niches représentent l'une Hermès, le dieu des commerçants, avec son casque ailé et un caducée à la main, l'autre le Satyre au repos d'après Praxitèle.
En entrant dans la galerie, mon œil est attiré par les fresques ornant le plafond.
Il semble qu'ici il s'agisse d'une représentation d'Hermès justement, qui rentre d'un voyage en mer en ayant fait fortune : c'est mon interprétation car, tenant dans la main gauche un caducée ailé, il brandit dans la main droite une bourse bien remplie.
Cela voudrait-il dire qu'ici on peut faire des affaires : une sorte de publicité déguisée, non ?
La galerie était située tout à côté des Messageries Laffitte et Gaillard, ce qui permettait aux voyageurs de faire leurs emplettes en attendant la diligence.
Peu de passage en cet après-midi de mai 2024 : les boutiques n'attirent plus autant...
L'intérieur de la galerie est aménagé de façon à donner une illusion de profondeur par la trame en diagonale du carrelage noir et blanc, la verrière éclairant l'ensemble constitué d'une suite ininterrompue de boutiques de luxe dont toutes les devantures sont en harmonie, surmontées d'un étage réservé à des appartements.
Cerise sur le gâteau, ce fut l'une des premières galeries couvertes chics de la capitale à être éclairée au gaz.
La boutique d'ameublement design de Pierre Gonalons
Encore du luxe avec les gants Thomasine
Anne-Marie, via Lisette, nous montre un portrait de l'actrice Rachel (1821-1858) qui a vécu dans l'un des appartements situés au-dessus des boutiques. Elle était un modèle pour Sarah Bernhardt.
Une anecdote qui a des répercutions jusqu'à nos jours : photographiée sur son lit de mort à la demande de la famille, la photo fuite et la famille intente un procès au journal, ce qui sera à l'origine du "droit à l'image".
Certaines boutiques ont gardé leurs enseignes d'origine telle celle-ci, autrefois imprimerie et maintenant dédiée aux sacs à mains de luxe.
Au numéro 6 de la rue Montesquieu, une façade attire mon attention : depuis 2014, il est le lieu d'un centre d'hébergement et pension de famille Emmaüs.
L'immeuble a changé de destination de nombreuses fois : établissement de bains, bazar, café et salle de concert, "bouillon", grand magasin, cantine...
Faisant l'angle entre la rue Montesquieu et la rue des Bons-Enfants : un immeuble à la façade intéressante porte un très beau bas-relief.
Il s'agit de faire la publicité du siège de l'Association générale du commerce et de l'industrie des Tissus et des Matières Textiles. A cette époque, la publicité ne passait pas par la télévision, on faisait les choses pour qu'elles durent !
Le passage Vérité fait communiquer la rue des Bons-Enfants avec la place de Valois. Ce nom de Vérité viendrait, selon l'historien Jacques Hillairet, d'un vendeur de gazettes qui y était installé.
La place de Valois est ainsi nommée en 1867 en l'honneur de Louis-Philippe 1er duc de Valois, fils aîné de Louis-Philippe duc d'Orléans. On peut y voir en son centre une sculpture d'un "Couple de lutteurs corps à corps" par l'artiste sénégalais Ousmane Sow (1935-2016). Elle exprime la lutte de l'homme qui se bat envers et contre tout.
Anne-Marie nous rappelle qu'il avait fait une exposition (que j'étais allée voir bien sûr en bonne parisienne) sur le pont des Arts en 1999, attirant plus de 3 millions de visiteurs.
Jolie, cette verrière à l'entrée de la place de Valois...
Les ors de la République dans la rue de Valois - Ministère de la Culture actuel
Il ne reste du Palais Cardinal (construit en 1624 pour Richelieu à partir de l'Hôtel de Rambouillet) que la Galerie des proues, photographiée ici depuis la Cour d'honneur du Palais Royal (le Cardinal avait en effet prévu qu'à sa mort le roi hériterait de sa demeure).
Cette galerie doit son nom aux bas-reliefs, tous différents, représentant des proues de navires, qui rappellent que Richelieu était Grand-Maître de la navigation.
Les balcons de la Cour d'honneur sont ornés du monogramme de Louis-Philippe 1er.
C'est là que se trouvent les fameuses colonnes de Buren, l'architecte Daniel Buren y ayant édifié en 1994 une œuvre intitulée "Les deux plateaux" constituée de colonnes de marbre de Carrare noir et blanc lui rappelant le tissu rayé des stores qu'il achetait dans sa jeunesse au Marché Saint-Pierre. Il désirait en faire un lieu que le public s'approprierait et c'est réussi puisque les enfants y jouent à Saute-Mouton régulièrement. On aime ou on n'aime pas mais c'est toujours plus sympa que le parking qui servait aux fonctionnaires des administrations environnantes !
Passé le premier péristyle, nous voici dans la Cour d'Orléans où se trouve une fontaine intéressante aussi, intitulée Les Sphérades, œuvre de Pol Bury.
Des fleurs d'ail décorent agréablement la troisième partie de cet espace, le jardin.
Anne-Marie nous raconte l'histoire du petit canon des Tuileries.
Le jardin du Palais Royal abrite aujourd’hui encore une véritable curiosité scientifique installée en 1786 dans les jardins. Inventé par un horloger voisin, le sieur Rousseau, ce canon miniature donnait l’heure exacte en tonnant tous les jours à midi... à condition bien sûr qu’il y ait du soleil !
En effet, à cette époque, pour avoir l’heure et régler sa montre, on se référait aux cadrans solaires ou méridiennes (cadrans verticaux), installés dans les rues bien exposées.
Le canon, lui, n'est pas lié à la météo : il est muni d’une loupe à travers laquelle le soleil passe à midi pile, enflammant la mèche qui déclenche la charge.
Et Boum ! Entendent les passants jusqu'à 1km à la ronde : c'est d'ailleurs de cette popularité que naît la célèbre expression "Midi pétante" !
Un petit panneau explique l'historique du petit canon.
Le canon a fonctionné jusqu'en 1911 où une loi imposa l'heure de Greenwich à la France. Après un vol en 1998, ce dispositif a été réinstallé dans les jardins en 2002 par le Centre des monuments nationaux, mais la loupe n’y est plus. Le canon tonne toujours mais il est déclenché manuellement tous les mercredis à midi pour le plus grand bonheur des parisiens et des touristes.
Anne-Marie nous parle ensuite des Galeries de bois du Palais Royal, créées en 1786, précurseurs des passages couverts. En plus de la centaine de magasins qu'elles abritaient, les Galeries présentaient aussi des attractions de typer cirque qui divertissaient les visiteurs. On parlait aussi de "Camp des Tartares".
Estampe du Musée Carnavalet (1786)
Les bancs du jardin du Palais Royal sont ornés de poèmes depuis 2018 : ils font partie de la série québécoise "Emily in Paris", passée sur Netflix en 2021, et de ce fait sont bien connus, même des étrangers. Faisant parfois référence à Colette ou à Jean Cocteau, celui-ci porte des vers de Marcelline Desbordes-Valmore : "Dors-tu ma vie ? Ou rêves-tu de moi ?"
Beauté de cette allée plantée d'arbres...
Mais aussi beauté de cette colonnade...
Les numéros des boutiques se suivent, fixés depuis des siècles dans ce joli carrelage.
L'extérieur n'a rien à envier à l'intérieur.
Les dessus de fenêtres sont ornés chacun d'une frise différente ! Vous remarquerez la couleur des stores rayés blancs et gris "à la Buren" :
Pas une fausse note...
Il serait intéressant d'en connaître la signification mais alors il faudrait faire la visite avec un architecte des Monuments Historiques.
Après quinze déménagements, Colette devient la dame du Palais Royal en intégrant le 9, rue de Beaujolais, d'abord à l'entresol puis à "l'étage noble", au premier.
Un petit restaurant, ça vous dit ?
On peut déjeuner à l'intérieur pour profiter des dorures de la grande salle...
(Photo Le grand Véfour)ou dehors en terrasse.
La visite guidée de la Bibliothèque Nationale Richelieu, rue Vivienne, ce sera peut-être pour l'an prochain, qui sait ?
Tout à côté, la rue des Petits-Champs porte ce nom car elle a été ouverte au XVIIe siècle à l'emplacement d'anciens marécages asséchés et transformés en champs. C'est là que se trouve l'entrée de la Galerie Colbert. Celle-ci a été percée en 1826 pour concurrencer la Galerie Vivienne voisine.
Elle est le siège de grandes écoles (Institut national d'histoire de l'art, Institut national du Patrimoine et même d'une partie de l'Université Panthéon-Sorbonne).
Au-dessus de l'entrée, un portrait de Colbert en pied.
Ici encore, la galerie est éclairée, le jour par l'intermédiaire d'une verrière, la nuit par d'élégants réverbères qui, autrefois, fonctionnaient au gaz.
Cette arche donne accès à une rotonde, elle aussi éclairée par une verrière.
Les arcades sont décorées de divers motifs dont celui-ci représentant une ruche ceinte d'une guirlande de fleurs, symbole du refuge et de l'activité grouillante.
Anne-Marie nous montre une photo de l'ancien candélabre en forme de cocotier lumineux qui trônait en son centre : il servait de point de rencontre aux grisettes (modistes, gantières, fleuristes ou lingères) qui s'y retrouvaient le cœur battant. Le mot "grisette" désignait avec condescendance, du XVIIIe au XIXe siècle, une jeune femme vivant en ville de faibles revenus, ouvrière de la confection, dentelière, employée de commerce, réputée sexuellement accessible (ce n'est pas moi qui le dit, c'est Wikipédia.). Le nom de "grisette" a d'abord désigné un tissu bon marché, la teinture ordinaire donnant, dès le premier lavage, des tons grisâtres : on ne connaissait pas à l'époque les lingettes décolorantes !
La statue actuelle, Eurydice piquée par un serpent de Charles-François Nanteuil, qui l'a remplacé (provenant des jardins du Palais Royal), est actuellement en restauration.
Les galeries, en veux tu en voilà ! L'entrée de la Galerie Vivienne se trouve rue des Petits-Champs.
Contrairement à la Galerie Colbert qui n'a pas eu la clientèle espérée à l'époque, la Galerie Marchoux, du nom de son premier propriétaire - qui prendra rapidement le nom de Galerie Vivienne de par son emplacement - bouillonne encore d'animation. Son aspect luxueux et la diversité de ses boutiques en font dès le XIXe siècle l'une des plus populaires de la capitale.
Avez-vous remarqué les superbes carrelages qui la décorent ?
Le principe est toujours le même : des arcades successives séparant les différents espaces, décorées à l'étage de stucs représentant des nymphes ou des déesses porteuses de la réussite commerciale et bourgeoise.
Cet endroit - le numéro 13 - est célèbre pour avoir été habité vers 1840 par un certain François Vidocq, bandit notoire de Paris. Il offrait en effet de multiples possibilités d'échapper à la police (la légende dit qu'un souterrain relie la galerie Vivienne aux jardins du Palais Royal...). Vidocq devint ensuite indicateur, puis chef de la Sureté sous la Restauration.
Les magasins de luxe s'y côtoient : mode, décoration, gastronomie culture...
Les numéros des boutiques se suivent, tous en harmonie.
Ici encore une rotonde
Les murs exposent la panoplie complète des attributs du commerce : caducées de Mercure, rubans, ancres, gerbes de blé, palmes, couronnes de laurier, cornes d'abondance : tout y est.
Nous ressortons par la rue de la Banque.
Un café y porte le nom de Bougainville : une plaque, juste au-dessus, indique que c'est ici qu'est décédé le grand navigateur le 31 août 1811 né à Paris en 1729.
Juste en face, la place des Petit-Pères : elle doit son nom au couvent des Augustins déchaussés qui y était installé. Je lui ai trouvé du charme avec son grand espace piétonnier. Une boutique d'objets de culte y voisine avec une boutique de thés réputée, la maison Dammann Frères, surmontée d'une statue de Vierge à l'Enfant.
La basilique Notre-Dame des Victoires qui donne sur la place a été construite à partir de 1629 suite à un vœu de Louis XIII d'édifier à Paris une église dédiée à la Vierge s'il remporte une victoire militaire face aux protestants. Une sorte de chantage, si je comprends bien...
Si je vous dis qu'en bas les pilastres sont d'ordre ionique et en haut d'ordre corinthien, vous me suivez... ?
L'intérieur est très chargé, entièrement recouvert d'ex-votos, en français, anglais, allemand, polonais, espagnol, portugais etc... Wikipédia dit qu'il y en a au moins 37.000 !
Lully (1632-1687) habitait rue des Petits-Champs et fut enterré dans l'église. Son cénotaphe est entouré d'ex-votos : à gauche et à droite sont assises deux pleureuses représentant la Poésie et la Musique. Sur le socle supérieur, deux statues d'enfants (ou génies pleurant). Au sommet trône le buste de Lulli en bronze, œuvre attribuée à Jean Collignon..
Au centre du chœur, sept toiles de Carle Van Loo (1705-1765) : celle du centre dépeint le vœu de Louis XIII au siège de La Rochelle, les six autres représentant des scènes de la vie de Saint-Augustin.
Couronnement de la Vierge à l'enfant (1628)- Carle Van Loo
Au sortir de l'église, nous traversons à nouveau la Galerie Vivienne,
pour ressortir cette fois-ci dans la rue Vivienne.
En face, l'entrée principale de la Bibliothèque Richelieu avec son jardin tout récemment planté de palmiers. Il a été conçu par l'artiste et jardinier Gilles Clément, le paysagiste Antoine Quénardel et l'architecte du patrimoine Mirabelle Croizier. Leur projet, intitulé Hortus papyrifer, introduit de nombreuses plantes papyrifères connues pour intervenir dans l'élaboration de supports d'écriture et d'impression : mûrier, bambou, papyrus. Ce jardin trace ainsi un lien évident avec la Bibliothèque, lieu de conservation emblématiques des œuvres sur papier.
Le square Louvois, lui, se trouve en face de l'entrée principale de la Bibliothèque que nous avons rejointe, rue de Richelieu. Créé par Jean-Charles Alphand en 1859, il rend hommage à l'ancien hôtel du marquis de Louvois (1641-1691) et à ses dépendances.
La fontaine Louvois est composée de sculptures allégoriques représentant quatre grands fleuves et rivières français : la Seine, la Garonne, la Loire et la Saône.
A l'angle de la rue des Petit-Champs et de la rue Sainte-Anne, Lully, le célèbre musicien (1632-1687) surintendant de la Musique à la cour de Louis XIV, s'est fait construire un hôtel particulier par un élève de Louis Le Vau, Daniel Gittard.
Une plaque est apposée sur l'immeuble joliment décoré de mascarons.
Elle indique que le musicien habita ici entre 1671 et 1683, date à laquelle il mourut fort bêtement. Le 8 janvier 1687, lors d'une répétition en présence de 150 musiciens de son Te Deum (sensé guérir le roi d'une fistule annale...), il se plante malencontreusement le bâton dont on frappe le sol pour battre la mesure alors qu'il n'obtenait pas ce qu'il voulait de ses musiciens. Sa jambe s'infecte rapidement et son corps se gangrène. Il meurt le 22 mars suivant à l'âge de 55 ans.
Ecoutez un court extrait du Te Deum de Lully...
Notre promenade touche à sa fin. Nous la terminerons à deux pas de là par la traversée du Passage Choiseul.
Construite entre 1825 et 1827, il s'agit du plus long des passages couverts parisiens (il mesure 190 mètres de long pour 3,7 mètres de large).
Il n'a pas le luxe de la Galerie Vivienne ni celui de la Galerie Vero-Dodat. J'ai remarqué que ses magasins de mode sont plus ordinaires et donc plus à la portée de toues les bourses.
Au numéro 64, rien de spécial en apparence sauf que Louis-Ferdinand Céline y vécut enfant avec sa mère qui y tenait une boutique de nouveautés. IL immortalisera le passage dans sa décrépitude en 1936, sous le nom de "passage des Bérésinas", dans Mort à crédit où il décrit la vie de ses parents.
Un passage de Mort à crédit (pages 55 et 69)
"On a quitté la rue de Babylone, pour se remettre en boutique, tenter encore la fortune, Passage des Bérésinas, entre la Bourse et les Boulevards. On avait un logement au-dessus de tout, en étages, trois pièces qui se reliaient par un tire-bouchon. Ma mère escaladait sans cesse, à cloche-pied. Ta ! Pa ! Tam ! Ta ! Pa ! Tam ! Elle se retenait à la rampe. Mon père, ça le crispait de l'entendre. Déjà il était mauvais à cause des heures qui passaient pas. Sans cesse il regardait sa montre. Maman en plus, et sa guibole, ça le foutait à cran pour des riens.
Les voisins, ils n'osaient pas trop se compromettre. Les chiens urinaient partout, et sur leurs vitrines aussi, pas spécialement sur la Méhon. On avait beau répandre du soufre, c'était quand même un genre d'égout le Passage des Bérésinas. La pisse, ça amène du monde. Pissait qui voulait sur nous, même les grandes personnes ; surtout dès qu'il pleuvait dans la rue. On entrait pour ça. Le petit conduit adventice l'allée Primorgueil on y faisait caca couramment. On aurait eu tort de nous plaindre. Souvent ça devenait des clients, les pisseurs, avec ou sans chien."
Le passage est aussi connu pour abriter la sortie de secours du célèbre théâtre des Bouffes-Parisiens qui contribue depuis son ouverture en 1857 à l'animation du passage. Le théâtre, où furent jouées un temps les pièces d'Offenbach, fut dirigé de 1986 à 2007 par Jean-Claude Brialy.
Avant de sortir du passage, vous remarquerez l'horloge : elle existait au XIXe siècle dans tous les passages couverts pour permettre aux voyageurs de ne pas louper la diligence !
Fin de la balade
Nous rejoignons le métro Quatre Septembre voisin.
Un grand merci à Anne-Marie pour cette visite comme toujours très intéressante.
4 commentaires -
Par Vandrezanne44 le 14 Mars 2024 à 23:00
Dans le cadre des "Marches de 6 km" qu'organise mon amie Anne à Générations 13, j'ai guidé une promenade dans le XVIIe arrondissement de Paris aboutissant au nouveau Tribunal de Paris où nous avons pu assister à une audience de la 23e chambre correctionnelle.
Le rendez-vous était donné au métro Place d'Italie. De là, nous avons rejoint la station de métro La Fourche, départ de la balade.
Depuis l'avenue de Clichy, nous enfilons la rue de la Condamine (de son prénom Charles Marie : explorateur et scientifique français du XVIIIe siècle) et passons devant quelques beaux immeubles en pierre de taille comme celui-ci aux N° 20-22 datant de 1901,
ou cet autre au N°43 de la rue Nollet qui croise la rue de la Condamine.
Un peu plus loin, la rue Truffaut (du nom du propriétaire de la rue) : au N°28, deux charmants pavillons datant de la première moitié du XIXe siècle encadrent une grille en fer forgé et permettent l'entrée à un petit hôtel particulier situé au fond de la cour. Ce fut, dit le net, la demeure des parents de Paul Verlaine entre 1857 et 1859.
Au N°20, une jolie grille en fer forgé à décor de feuillage
Nous empruntons ensuite la rue des Dames (ainsi nommée car elle conduisait autrefois à l'abbaye royale Notre-Dame de Montmartre, fondée au XIIe siècle par Louis VI).
Au N°43, un immeuble très élégant possède un beau balcon en fer forgé.
Dix numéros plus loin, au N°53, un bâtiment en briques et pierre appartient à Enedis. Il s'agit d'une ancienne usine électrique. En 1900, cette société d’éclairage était l’une des six qui alimentait la Capitale.
Tout en haut du bâtiment, un fronton néoclassique, décoré de panneaux de céramique brune, précise la date de construction : "Anno 1890".
Les trois premiers niveaux sont bâtis en pierre de taille, mais laissent apparaître une structure métallique.
Au sommet des pilastres, des éclairs sculptés symbolisent la puissance électrique.
La salle des machines était derrière, dans un grand hall de 57 mètres de long, invisible depuis la rue. Puis se trouvait une cheminée de près de 50 mètres de haut, et derrière encore, la salle des chaudières, en sous-sol. L’ensemble était conçu pour "assurer le service de 45.000 lampes à incandescence de 10 bougies", et alimenter les quartiers des Epinettes, de Batignolles, de la Plaine-Monceau, de l'Europe, du Roule, de la Madeleine, des Grandes-Carrières et de la Chaussée-d'Antin.
Nous avons maintenant rejoint l'avenue de Clichy où se trouve la Mairie du XVIIe. Une "pelle Starck" en raconte l'histoire.
Voici à quoi ressemblait l'ancienne mairie à son inauguration en 1849 en présence du futur Napoléon III. On l'appelait "Le biscuit de Savoie" à cause de son campanile.
L'ensemble de l'édifice fut détruit en 1952, le campanile menaçant de s'effondrer. Regardez la photo ci-dessous où le campanile s'envole comme un ange !
Une nouvelle mairie, ultra moderne, vit le jour en 1973.
Evidemment, ça change... mais il faut vivre avec son temps, non ?
La façade de ce bâtiment résolument moderne a été végétalisée grâce à l'adjonction d'immenses bacs à fleurs suspendus.
Nous avons visité l'intérieur sous le prétexte de toilettes (Anne prévoit toujours des pauses techniques dans les balades qu'elle propose) et nous avons eu raison car il y a là un superbe escalier, oeuvre de l'architecte d'intérieur Raphaël : des marches de marbres pour le côté classique, une rampe en bronze pour le côté novateur et une main-courante recouverte de cuir pour le confort.
Bien en évidence à l'entrée de la mairie, un panneau présente des photos de personnalités ayant habité le XVIIe arrondissement.
Pour en découvrir la liste, cliquez ICI.
J'ai pris ces deux photos, côte à côte d'Auguste Bartholdi, l'homme de la statue de la Liberté à New-York, et de Claudine Coster, actrice et épouse de Robert Manuel.
Petit souvenir de notre visite à la Mairie
Triste actualité...
Dans la rue Bridaine que nous avons rejointe (Jacques Bridaine était missionnaire au XVIIIe siècle à l'église Sainte-Marie-des-Batignolles), deux immeubles remarquables.
Au N°11, celui-ci avec ses bow-windows,
Au N°7, cet autre de style Art nouveau.
L‘arc de la fenêtre en fer à cheval du premier étage possède un décor sculpté, signé « Véraza », qui constitue l’élément le plus remarquable de cette façade.
Au bout de la rue, nous prenons la rue Lamandé (du nom d'un architecte français de la fin du XVIIIe siècle) où se trouve au N°15 l'Ecole polonaise. Celle-ci a été créée à Chatillon-sous-Bagneux en 1842. Le 3 avril 1843, fut donné un concert avec la participation de Frédéric Chopin ainsi que des artistes français parmi lesquels la célèbre actrice Rachel. L'argent ainsi récolté fut consacré aux besoins de l'école.
L'Ecole fut déplacée ici dans le quartier des Batignolles en 1844.
Les bâtiments de style Louis XIII en brique, pierre et ardoise, sont disposés autour d'une cour fermée par une grille - décorée de l'aigle polonais - encadrée par deux pavillons.
Elle fut fondée pour accueillir les enfants des immigrés polonais suite à l'échec de l'insurrection de 1830 contre le roi de Pologne Nicolas Ier, proche du tsar. Les étudiants et les enseignants de l'école polonaise participèrent plus tard à l’Insurrection de Janvier 1863 contre l'empire russe, à la guerre de 1870-1871 contre la Prusse et à la Commune de Paris. Ces événements ont été commémorés par une plaque placée sur le mur dans la cour de l'école.
Dans la cour, un buste de Séverin Gałęzowski (1801-1878), médecin-chirurgien et bienfaiteur de l'école, par Cyprien Godebski, sculpteur franco-polonais.
J'adore l'enfant, en bronze, qui écrit sur la stèle en polonais : A LA FRANCE HOSPITALIERE.
Cliquez ICI pour accéder à un document très détaillé sur l'Ecole polonaise.
Nous voici maintenant arrivés devant l'église du quartier, Sainte-Marie des Batignolles. La légende dit qu'un ouvrier aurait trouvé, lors des travaux de fondation, une statuette de la Vierge qui a disparu depuis. Plus sûrement, la Duchesse d’Angoulême avait souhaité que la dédicace de la nouvelle église soit faite à sa sainte patronne.
L'aspect actuel de l'église, qui est construite en ciment armé et est de style néo-classique, date du milieu du XIXe siècle. Elle a la forme d'un temple grec. Son fronton triangulaire est soutenu par quatre colonnes. C'est l'une des rares églises qui ne possède pas de clocher. Elle possède cependant une cloche - Etiennette - dans un petit campanile construit en 1857 à la suite d'un projet de construction de deux clochers qui ne verront pas le jour.
L'intérieur n'a rien d'extraordinaire.
On peut cependant y voir une Assomption de la Vierge de style rococo (artiste anonyme) éclairée par un puits de lumière naturelle.
Juste derrière l'église, l'entrée du square des Batignolles
A l'origine, un vaste terrain vague servait d'entrepôt aux matériaux de démolition. En 1835, il fut transformé en place publique, la place de la Promenade. Chaque année, le premier dimanche après le 15 août, la fête patronale du village réunissait les Batignollais. Durant quinze jours, forains, acrobates, clowns, théâtres ambulants boutiques et attractions les plus variées s'installaient ici.
Sous Napoléon III, la capitale se dote de nombreux parcs et jardins à l'image des squares anglais (l'Empereur avait ramené ce goût des jardins d'un voyage en Angleterre). C'est ainsi qu'en 1876 l'ingénieur Jean-Charles Alphand transforme la place en jardin.
Nous empruntons l'allée centrale du parc, l'allée Barbara, qui rend hommage à l'autrice, compositrice et interprète (1930-1997) qui habitait à proximité.
Le square est agrandi en 1894, et le buste de Léon Dierx, parnassien sacré "Prince des Poètes" en 1898, inauguré en 1930. Le Parnasse est un mouvement qui s'oppose au Romantisme. On connait peut-être mieux Leconte-de-l'Isle ou José-Maria de Hérédia, non ?
Le parc a été conçu comme un jardin à l'anglaise, légèrement vallonné, avec une grotte, une rivière, une cascade et un lac miniature. Au fond, le kiosque traditionnel des jardins haussmanniens.
Une végétation très exotique y fut plantée à la fois pour émerveiller les sens mais aussi pour montrer la puissance du Second Empire, capable de faire vivre des espèces venant de tous les horizons climatiques.
Tout comme au parc Montsouris, au parc Montceau ou aux Buttes-Chaumont, les espaces aquatiques sont enjambés par des petits ponts munis de rembardes en ciment aux dessins végétaux.
Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
Coin-coin les Colverts !
L'étape suivante est la traversée du Parc Martin Luther-King voisin.
Le parc rend hommage au pasteur Martin Luther-King (1929-1968), prix Nobel de la Paix en 1964. Il lutta contre la discrimination raciale aux Etats-Unis où la ségrégation était alors légale. Prônant l'action non violente pour obtenir l'égalité des droits civiques, il marqua particulièrement les esprits avec son discours "I have a dream" le 28 août 1963 à Washington.
L'entrée n'est guère accueillante mais..., ne vous y fiez pas !
On aperçoit au loin et au centre de la photo, le nouveau Tribunal de Paris avec ses terrasses végétalisées.
Le parc est un terrain de jeux formidable pour les jeunes car il possède de nombreux équipements sportifs.
Le printemps montre le bout de son nez avec ce camélia en fleurs.
Il s'agit d'un quartier résolument moderne : le parc a ouvert en 2007 alors qu'aucun bâtiment n'était encore sorti de terre. Bâti sur une friche ferroviaire de 50 ha, le nouveau quartier de Clichy-Batignolles change rapidement de visage entre 2016 et 2020. On y compte actuellement quelque 7500 habitants.
Cliquez ICI pour voir le plan du parc et ses aménagements : vous verrez le petit bonhomme le parcourir !C'est grâce à notre amie Anne que nous avons fait cette belle balade.
Qui dit friche ferroviaire dit ballast : flore et faune adaptées sont réunies ici pour évoquer la mémoire du rail.
Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
Sympas ces immeubles bardés de bois dans l'écoquartier...
Cet ancien bâtiment - qui sert actuellement de toilettes - est celui de l'ancienne forge : il était utilisé au XIXe siècle par les ouvriers de la SNCF comme le maréchal-ferrant etc.
La passerelle et la forge accueillent maintenant un restaurant "Le Hoba" mais celui-ci est fermé le jeudi.
Le HO, c’est ce belvédère avec une terrasse extérieure. Au menu de cette grande halle vitrée : un food court organisé autour de chefs·fes engagés·es à vous proposer une cuisine durable et un grand bar pour des rafraîchissements tout aussi frais et consciencieux.
En BA : cette ancienne forge du XIXe siècle vous accueille dans une ambiance plus intimiste autour d’une programmation riche qui ira au-delà de l’assiette et investira la cuisine ouverte et le forum d’échange. Et si vous voulez seulement vous rafraîchir, vous serez comme des coqs (et des poules) en pâte dans notre café central.
Nous arrivons au niveau de la pièce d'eau (alimentée par les eaux de la Seine décantée et filtrée par un système de plusieurs bassins successifs) qu'aucun chemin ne traverse.
Deux moyens pour la franchir : soit on prend la passerelle qui l'enjambe, soit les ascenseurs. C'est cette dernière solution que nous choisirons.
Vue sur le parc depuis la passerelle
Les voies de chemin de fer de la Petite Ceinture
On dirait bien que la pelouse est habitée...
En effet, des oies bernaches l'ont colonisée.
Chemin faisant nous arrivons à l'autre extrémité du parc où se trouve une sculpture représentant un grand livre. A l'occasion de sa visite d'Etat en 2014, Sa Majesté la Reine Elizabeth II a souhaité offrir un présent aux parisiens : il s'agit de l'Open Book, une création de Diane Maclean. "
Symbole de l'amitié entre nos deux nations, cette sculpture est "Un livre ouvert que nous écrivons ensemble".
A l'intérieur du livre, un miroir teinté
n
Et vu de dos, de jolis reflets apparaissent reflétant, si l'on regarde bien, l'image du Tribunal de Paris.
Nous voici sortis du parc au niveau du Boulevard Berthier : là, se trouvent trois bâtiments dont les architectures s'affrontent : au premier plan les réserves (décors et costumes) de l'Opéra de Paris et les Ateliers Berthier-Odéon, annexe du célèbre théâtre parisien (anciens entrepôts de décors de l'Opéra de Paris), et au second plan à droite le Tribunal de Paris, œuvre de l'italien Renzo Piano (l'architecte du Centre Pompidou)..
Un dernier regard sur le quartier Clichy-Batignolles
La traversée des maréchaux se fera sur ce pont.
Nous empruntons la rue du Bastion, longeant l'immeuble moderne du siège du Crédit Mutuel. Voyez-vous le tribunal se refléter dans la vitre... ?
Le N°36 de la rue du Bastion : un numéro qui n'a pas été donné au hasard : il s'agit bien sûr de la nouvelle Direction de la Police Judiciaire qui se situe désormais ici depuis son déménagement du N°36 Quai des Orfèvres en septembre 2017.
Evidemment, cela change de son ancien emplacement, sur l'île de la Cité !
Juste derrière, le Tribunal de Paris a été conçu par Renzo Piano et réalisé par Bouygues.
Nous passons devant la Maison des Avocats.
En bonne compagnie pour la pause du midi à la boulangerie du coin
Nous voici devant l'entrée du Tribunal composé de quatre blocs dont les terrasses sont arborées (mais fermées au public et même aux avocats : elles sont réservées aux magistrats, prestige oblige...) : il semble nous toiser du haut de ses 38 étages répartis sur une hauteur de 160 mètres.
L'intérieur du bâtiment, tout de verre vêtu, est un immense espace qui s'étend du sol au plafond sur les six étages desservis par des escaliers roulants. Anne a écrit sur la fiche qu'elle m'a donnée que ce palais de justice se devait d'être beau, spacieux, clair et rassurant pour les justiciables.
Un plafond de verre illumine l'ensemble.
A l'intérieur, des phrases extraites de la Déclaration universelle des droits de l'homme - 1948 (René Cassin)
L'article 9
L'article 1
Nous avons pris les escalators pour bien profiter de ce grand espace inondé de lumière.
Article 6 : "Toute personne a le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable."
Vue plongeante...
Françoise Feugeas, une fidèle des promenades d'Anne, a gentiment proposé d'organiser cet après-midi au tribunal pour nous permettre d'assister à une audience.
Françoise nous donne d'abord quelques informations sur le nouveau tribunal : il est l'œuvre de Renzo Piano (87 ans à ce jour), a été inauguré en 2019 et a coûté 2,4 milliards d'euros. L'état va devoir payer pendant 27 ans un loyer de 90 millions d'euros par an avant d'en devenir le propriétaire. 700 personnes (?) y travaillent et 4000 personnes s'y croisent chaque jour. Les boxes de garde à vue se trouvent dans les sous-sols : ils remplacent la "souricière" de l'ancien Palais de Justice de la Cité. Il est donc impossible de croiser les détenus dans les couloirs. Il s'y pratique des audiences civiles et pénales. Il y a ici 800 bureaux de magistrats et 1200 bureaux de greffiers...
Nous choisissons d'assister à une audience pénale dans la 23e chambre correctionnelle, celle des comparutions immédiates (petite délinquance).
Françoise nous montre un schéma de la configuration de la salle N°1.
Bien sûr tous les téléphones ont été éteints : la photo ci-dessous vient du net.
Voici la salle dans laquelle nous avons passé presque trois heures.
La session commence tous les jours autour de 13h30 et se termine après de longues heures de débats souvent tard, une fois que tous les dossiers ont été traités, parfois même après minuit, nous dit Françoise.
Le tribunal est composé aujourd'hui de jeunes femmes de moins de 30 ans : une Présidente et ses deux assesseures, une Procureure. Il y avait aussi une greffière qui parcourait la salle en apportant les dossiers concernés et une autre à l'ordinateur pour enregistrer les débats. Quant aux avocats, tous jeunes eux aussi, il y avait un seul homme mais au moins quatre femmes parmi ceux de la Défense tandis que la Partie Civile était assurée par un seul avocat (ce dernier n'a pas eu à intervenir dans la partie de l'audience à laquelle nous avons assisté).
Les prévenus qui sortent de garde à vue sont amenés dans le box vitré par des policiers et - cela m'a frappée - ils se tiennent les mains dans le dos même s'ils ne sont pas menottés.
Quant au public, il s'assoit sur les bancs qui, je vous l'assure, font mal aux fesses après plusieurs heures !
Nous avons vu défiler quant à nous pas mal de prévenus, tous très jeunes (entre 18 et 25 ans), presque tous impliqués dans ce qu'on appelle "les produits" (le cannabis, la cocaïne, l'héroïne et la méthamphétamine), avec parfois un profil psychiatrique, souvent élevés par une mère seule.
Le cas des deux cousins, eux aussi mêlés à un trafic de drogue, et qui sont solidaires entre eux, m'a particulièrement touchée.
La Présidente et la Procureure avaient l'air chevronnées, en tout cas pas tendres. Nous n'avons pas eu le courage d'attendre les délibérations ce qui fait qu'on est restés un peu sur notre faim...
Merci à Anne et à Françoise pour cette journée fort intéressante.
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Si vous voulez, vous pouvez lire ci-dessous l'article de Emile Benech, journaliste à Ouest-France : il vous donnera une idée de ce qu'est une comparution immédiate et de ce à quoi nous avons assisté.
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La comparution immédiate est une procédure rapide et de plus en plus utilisée, créée pour désengorger la justice française, en difficulté. À la 23ème chambre, on voit donc passer beaucoup de monde, d’horizons parfois différents, mais souvent ancrés dans la même précarité.
A 13h30, l’audience doit commencer. L’huissier coordonne les derniers préparatifs avec habilité. Il jongle entre ses dossiers, afin de savoir quel prévenu faire entrer en premier, sachant que tel avocat manque à l’appel, que tel dossier est introuvable, ou que tel prévenu n’a pas encore effectué son enquête de personnalité. Il se passe encore 30 minutes d’attente avant que le tribunal entre. Le tribunal, c’est trois juges : un président, dans le cas présent une présidente, et deux assesseurs. Lorsque ces derniers arrivent, l’huissier lance un tonitruant « Levez-vous, le tribunal ! » Le tribunal s’installe, la salle s’assied. La présidente explique brièvement la séance d’aujourd’hui. Elle sera chargée, puisqu’il s’agit d’entendre quinze prévenus en cinq heures. Vingt minutes seraient donc allouées par prévenu en moyenne.
Le palais a beau avoir changé, s’être agrandi, être plus moderne, son principe reste inchangé. Dans la salle d’audience 2.05 du tribunal de grande instance de Paris (TGI) séjourne la 23ème chambre correctionnelle. Celle des comparutions immédiates, la procédure la plus rapide du système correctionnel français. Elle consiste à faire juger un prévenu directement après sa garde à vue, sur décision du procureur. Le délit, puisque la 23ème chambre ne s’occupe ni des crimes ni des contraventions, doit être puni d’au moins 2 ans de prison, ou six mois s’il s’agit d’un flagrant délit. Ces audiences, se passant autrefois sur l’île de la Cité, dans le palais de justice historique, ont déménagé et se déroulent aujourd’hui dans la super structure judiciaire finie l’année dernière. Cette dernière, haute de 160 mètres, trois fois plus grande que le palais de justice, doit représenter la justice de demain. L’effet visuel est assuré par les grands espaces et la blancheur du palais, où les boiseries et les plafonniers ont laissé place aux escalators et aux grands espaces aseptisés. Entrer dans la salle 2.05, c’est aussi voir la modernisation de l’architecture judiciaire. L’espace est resserré, le tribunal a quitté sa posture dominatrice, et a été- un peu- abaissé. Les prévenus paraissent dans un box vitré, mais, à la suite d’un mouvement des avocats, ouvert. Pour que la défense puisse s’adresser à ses clients sans barrière. L’un des avocats commis d’office s’en réjouit brièvement, un gain « d’humanité » selon lui. La procureure, en face de lui, semble grincer des dents.
La salle d’audience 2.05 du TGI de Paris : la vitre qui le clôture a été retirée suite à un mouvement de grève des avocats.
Lorsqu’on assiste à une audience d’une chambre correctionnelle comme la chambre des comparutions immédiates, on s’attend à avoir en face de nous des délinquants, des vrais. Et il y en a. Mr Bouazar (Tous les noms ont été changés) semble en faire partie, d’ailleurs. Il est soupçonné de violence sur quatre policiers dans l’exercice de leurs fonctions. Il aurait agressé ces policiers, puis, enfin maitrisé, les aurait menacés de mort en criant : « je suis Daech ». A l’audience, Mr. Bouazar est agité, il demande la parole, puis ne la souhaite plus. Son avocate lève les yeux, et demande contre l’avis du prévenu une expertise psychiatrique. Celle-ci sera retenue, avec un renvoi afin de permettre aux présumées victimes d’assister à la comparution. Sur les onze prévenus de cette audience, seuls trois étaient pourtant soupçonnés de délits violents.
Durant les coupures, brèves mais récurrentes, Me Richman, avocat pénaliste, raconte. Lui, qui a un cabinet qui marche plutôt bien, continue à venir pour s’occuper de commissions d’office parce qu’il juge ça nécessaire. Il a « de la bouteille », et s’en sert ici. Plus jeune, il n’arrivait pas forcément à trouver de bonne stratégie de défense pour ses clients. Aujourd’hui, il pense que son travail est plus d’apprendre à son client à dire la vérité.
Idir, lui, a 19 ans. La police l’arrête dans une voiture le voyant pianoter sur un téléphone portable. Le jeune homme a l’air tendu, s’en suit une fouille, et l’on découvre sur lui 15 grammes de cocaïne. Il explique avoir été forcé de ramener la drogue d’un point à un autre après avoir commis une erreur. A-t-il le profil d’un dealer ? Pas vraiment, selon l’avis- fait assez rare pour être énoncé- et du procureur et de la défense. Il vit chez ses parents, bien intégré, a un casier vierge et suit un BTS d’informatique à l’université Paris 2. Mais cela ne suffira pas à convaincre le tribunal. Après délibération, le verdict tombe, Idir purgera une peine d’un an de prison.
On fait surtout face, lors de cette audience, à une précarité installée. Nombre de ceux qui vont être entendus aujourd’hui sont sans domicile fixe. Le premier, c’est Kristian. Ce polonais de 23 ans, qui a besoin d’un interprète, est ici pour le vol d’un fût de bière au Carrefour et pour avoir, sous l’effet de l’alcool tenté d’allumer un feu dans sa cellule. Kristian a du mal à s’exprimer, mais il explique avoir des problèmes psychologiques suite à ses dernières années passées dans la rue. Il a essayé de se jeter d’un pont l’année dernière. Après délibération, le tribunal décidera d’une peine de 8 mois de prison.
Au fur et à mesure des auditions, on sent des tensions s’installer. Le manque de temps, puisque les dossiers s’enchainent, mais pas assez vite, et que l’audience prend beaucoup de retard. L’émotion des auditeurs, qui parfois apparentés aux prévenus, et qui lâchent des exclamations ou des pleurs lors des rendus de délibérés. La sévérité du parquet, aussi, qui demande exclusivement des peines de prisons fermes avec mandat de dépôt immédiat, ce qui agace les avocats des prévenus. Ces derniers ne font rien pour s’en cacher, et les échanges avec la procureure vibrent de plus en plus. Le tout rend l’ambiance chargée, électrique.
D’autres prévenus ayant des problèmes financiers sont présents. Ici, nous avons Mr. Zoubir et Mr. Amrani. Le premier, 70 ans et le second, 57, sont soupçonnés d’avoir cambriolé 4 hôtels entre le 4 et le 24 décembre. Mr Zoubir, cheveux blancs, chemise noir et pull kaki explique qu’il touche 460 euros par mois. Ce sont ses enfants qui l’aident à finir le mois. Il croise alors le regard de sa fille, présente dans la salle, et les deux éclatent en sanglot. Mr Amrani prend la parole à la fin de son audience. Sa voix est tremblante, son avocate dit à voix basse ne pas comprendre comment la présidente de la séance peut le mettre dans cet état. Il exprime ses regrets et sa honte. Verdict : 1an d’emprisonnement ferme.
Graphique rassemblant les grands chiffres des comparutions immédiates, réalisé par L'Observatoire International des Prisons
Il est maintenant vingt heures, l’audience, a pris une heure et demi de retard. La salle s’est progressivement vidée, il ne reste guère que cinq six personnes dans les bancs des auditeurs libres, diminuant par extension la tension. Mais la fatigue, elle, se ressent. Et pour la procureure, qui n’a que peu de repos, et pour les avocats, qui alternent à tour de rôle leur présence. Et, bien sûr, pour le tribunal, qui appelle, qui interroge, et qui, au final, juge.
Christophe et Samir, tous deux sans domicile fixe, ont essayé de dérober le portefeuille d’un septuagénaire. Ça n’était pas leur première fois. L’un est présent sur le territoire de manière illégale. Tous deux, s’ils gardent une posture droite, ont la voix tremblante. Ils reconnaissent les faits, et prennent respectivement 1an d’emprisonnement ferme.
Si l’on fait le bilan de cette journée : des quinze prévenus initiaux, quatre ont demandé, et obtenu, un report de leur audience. Les onze autres seront entendus. Trois d’entre eux avec une caractérisation de violence, un pour trafic de stupéfiants, les sept autres pour vol. cinq étaient sans domicile fixe. Tous, sauf le prévenu inculpé pour trafic de stupéfiants, étaient dans un état de précarité, c’est-à-dire, selon la définition du Conseil économique, social et environnemental (CESE) dans « l’absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. ». Ils vivaient tous (à l’exclusion du prévenu spécifié précédemment) sous le seuil de pauvreté. Ils ont tous été jugés coupables, et ont tous été condamnés à une peine de prison ferme.
2 commentaires -
Par Vandrezanne44 le 12 Mars 2024 à 23:00
Ce mardi après-midi, la pluie s'est invitée à la balade que nous proposait Michel Duffau dans le cadre des "Petites promenades dans Paris" de Générations 13.
Nous sommes une dizaine à nous être inscrits à cette visite de l'intérieur de trois églises parisiennes situées au centre de la capitale dans le quartier latin : Saint-Séverin, Saint-Julien-le-Pauvre et Saint-Etienne-du-Mont.
Michel nous a donné rendez-vous à la station Cluny-La Sorbonne. Il nous emmène tout d'abord rue de la Huchette qui tire son nom d'une enseigne attestée de la fin du XIIIe siècle "La Huchette d'or".
Connaissez-vous la chanson d'Yves Simon intitulée "Rue de la Huchette" ? Elle date de 1973 et rend bien l'ambiance qui régnait dans ce lieu autrefois...
Dans le rue de la Huchette, deux hauts lieux de la vie nocturne parisienne :
► Le théâtre de la Huchette a été créé en 1948 : c'est ici que depuis plus de 65 ans deux pièces d'Eugène Ionesco, "La Leçon" et "La Cantatrice chauve", sont jouées chaque soir, comptant à ce jour plus de 20 000 représentations, une longévité unique dans l'histoire mondiale du théâtre. Ces deux pièces détiennent le record du monde du spectacle joué sans interruption dans un même lieu.
► Le Caveau de la Huchette, créé également en 1948, est un club de Jazz installé dans une cave dans lequel tous les grands musiciens du genre se sont produits : Lionel Hampton, Count Basie, Art Blakey, Memphis Slim, Bill Colleman, Rhoda Scott, Claude Luter, Claude Bolling etc.
Une photo que j'ai empruntée à Monick...
Au N°14 de ladite rue, à l’angle de la rue du Chat-qui-Pêche, un médaillon plaqué sur la façade est orné d’un Y, rébus pour "lies-grègues", lacets de fixation entre culottes et hauts-de-chausse vendus par les merciers.
Autrefois, on appelait en effet les hauts-de-chausses (vêtement masculin qui allait de la ceinture aux genoux) des "grègues" ou "grèques", à cause de la ressemblance avec les courtes et larges culottes des Grecs. Le nœud de ruban vendu par les merciers pour l’attacher au pourpoint (vêtement masculin du haut du corps porté par les hommes au Moyen-Age), se nommait lie-grèques, d'où le jeu de mots, un peu tiré par les cheveux, mais qui fonctionne !
Si les enseignes et leur signification vous intéressent, vous pouvez cliquer ICI pour lire l'article très intéressant fait par Danièle Sallenave de l'Académie française sur le sujet.
Nous rejoignons ensuite l'église Saint-Séverin dont nous visiterons l'intérieur assez rapidement, le but de Michel étant surtout de nous emmener voir l'ancien cimetière attenant. L'église Saint-Séverin présente en effet la particularité, exceptionnelle à Paris, d'avoir conservé quasiment intact l'emplacement de son cimetière et de son charnier.
L'église tire son nom de l'ermite Séverin qui, au VIe siècle, avait l'habitude de prier dans un petit oratoire rudimentaire. Après sa mort, une basilique (d'abord une chapelle) est érigée sur les lieux.
Détruite par les Vikings lors du siège de Paris (885-887), l'église est reconstruite au XIIIe siècle en ce qui concerne le clocher et les trois premières travées de la nef et dans la seconde moitié du XVe siècle pour le reste (photo ci-dessous).
Par chance, la Révolution ne l'endommagera pas.
Michel nous montre, au niveau des chapelles latérales, les vitraux contemporains de Jean Bazaine (1904-2001) posés en 1970, une commande du curé de la paroisse, qui représentent les sept sacrements. Pour info, la voûte de la station de métro Cluny-La Sorbonne a également été décorée par Jean Bazaine (il s'agit alors de mosaïques).
L'église est réputée pour son chœur entouré de la forêt de colonnes du double déambulatoire (XVe siècle). Au centre, une superbe colonne torsadée éclairée par une lumière artificielle. En arrière-plan, les vitraux de Jean Bazaine illuminent le déambulatoire.
On parle ici parfois de la "palmeraie" de Saint-Séverin.
Michel nous emmène ensuite voir le jardin adjacent situé au sud de l'église entre les rues Saint-Jacques, de la Parcheminerie et des Prêtres-Saint-Séverin.
Construites à la fin du XIVe siècle, trois galeries voutées d’ogives entouraient le cimetière à la manière d’un cloître. Au centre étaient des fosses communes où l'on enterrait les petites gens. Les galeries voûtées d'ogives ceinturant cet espace étaient réservées aux plus aisés. Vers 1763, environ 250 personnes étaient inhumées chaque année dans le cimetière.
Jusqu'au début du XXe siècle, les galeries étaient surmontées de deux étages de logements réservés aux prêtres (ici, une photo prise en 1907).
Nous rejoignons ensuite l'église Saint-Julien-le-Pauvre voisine dans laquelle nous trouvons un abri contre la pluie qui ne cesse de tomber...
Tout comme Saint-Séverin, elle ne possède pas de transept. Il s'agit en fait d'une église de confession orthodoxe dans laquelle les fidèles sont séparés du clergé par une iconostase. L'iconostase est une cloison porteuse d'icônes héritière de la balustrade en bois ou en pierre qui, dès le IVe siècle au moins, séparait le sanctuaire de la nef. Elle est ici éclairée par des lampes.
Deux portes donnent accès au prêtre qui officie derrière.
Les icônes sont un symbole que l’on vénère - et non des idoles - à l’inverse de l’adoration qui est due à Dieu seul.
A gauche de l'iconostase, une icône représente Saint-Julien-l'Hospitalier, Patron des bateliers, des voyageurs et des aubergistes.
D'après sa légende que je simplifie ici, Julien était un noble chasseur à qui un cerf aurait prédit qu'il tuerait ses père et mère. Après avoir fui son pays pour éviter ce crime, il les aurait tués par erreur ; en expiation, il aurait fondé un hôpital dans un lieu retiré où il se fit passeur (d'où le sens de cette icône).
De l'autre côté, une icône représente une Vierge à l'Enfant.
Un joli chapiteau sculpté
A la sortie de l'église, un objet en cuivre très élégant sert à conserver le pain bénit que les fidèles emportent chez eux à la table du foyer familial, un rite perdu dans la religion catholique mais qui perdure ici.
L'église était assez sombre, je n'ai pas vraiment distingué son cabochon mais il est très fin.
A la sortie, un peu de soleil enfin !
Michel nous montre différentes photos d'iconostases en France et dans le monde. Sur cette page, la cathédrale russe orthodoxe de Nice.
Une merveille d'architecture édifiée par le tsar Alexandre II en souvenir de l'endroit, proche, où son fils le tsarévitch Nicolas mourut d'une méningite.
En voici l'iconostase
Paris et sa banlieue possèdent, outre Saint-Julien-le-Pauvre, de nombreuses églises orthodoxes. La Cathédrale Alexandre Nevsky, située rue Daru, en est une : en voici l'iconostase.
Il y a aussi la récente Cathédrale de la Sainte-Trinité, voisinant la tour Eiffel, aux bulbes dorés, une commande de Bertrand Delanoë alors maire de Paris, édifiée par l'architecte Jean-Michel Wilmotte dont voici l'iconostase.
J'aime beaucoup celle de l'église orthodoxe russe Saint-Nicolas de Toulouse.
J'arrête là avec les églises orthodoxes qui sont également pléthore de par le monde, en Russie, en Roumanie, en Bulgarie, en Grèce, en Albanie, en Turquie, en Pologne...
Non loin de là, rue Galande, le club de jazz "Aux Trois Mailletz" est installé dans des caves médiévales authentiques du XIIIe siècle. Il a accueilli lui aussi tous les grands du Jazz. Le club des Trois Mailletz a aussi permis à des chanteurs et des poètes de se produire alors qu'on les refusait ailleurs. Ainsi, Léo Ferré, Catherine Sauvage, Jean-Roger Caussimon, Nina Simone y ont-ils donné plusieurs spectacles. Il a aussi vu les débuts de Zaz et de Dany brillant.
Très élégant ce portail : Michel nous dit que Claude Nougaro a habité ici les cinq dernières années de sa vie en compagnie de son épouse, Hélène Nougaro.
Nous voici arrivés en vue de Notre-Dame dont les échafaudages de la flèche viennent d'être retirés partiellement (300 tonnes tout de même...).
Au premier plan, dans le square Viviani, le plus vieil arbre de Paris, un robinier faux-acacia, est désormais muni d'une béquille en béton : il faut dire que, envoyé sous la forme d’une graine depuis l’Amérique (région des Appalaches - sud des Etats-Unis) à Jean Robin (1550-1629), herboriste d’Henri IV, il réside à ce jour à Paris depuis quelque 423 ans !
Son nom latin est "Robinia" : il a été adopté par Linné, un herboriste du XVIIe siècle en hommage à Jean Robin qui l'avait planté en 1601.
Le printemps pointe le bout de son nez au square Viviani (homme d'état français ayant signé l'ordre de mobilisation générale le 1er août 1914).
Au centre, une fontaine de bronze moderne du sculpteur Georges Jeanclos (1995) remplace maintenant l'ancienne fontaine Wallace. J'avoue que je ne l'avais jamais remarquée et pourtant elle ne manque pas d'originalité. Le sculpteur, d'origine juive, a été marqué par le passé de sa famille pendant la deuxième guerre. Il sculpte ici des enfants se prenant dans les bras, comme acte d'amour en réaction à l'holocauste.
Un dernier regard vers Notre-Dame
Il y a la queue devant la librairie "Shakespeare and Company" située rue de la Bûcherie : elle porte ce nom depuis 1964, date du 400e anniversaire de William Shakespeare, même si elle a été créée bien avant la guerre et sert à la fois de librairie et de bibliothèque spécialisée dans la littérature anglophone. Depuis 2015, un café y a été adjoint avec une vue imprenable sur Notre-Dame : ce dernier sert principalement des plats végétariens, avec des options vegan et sans-gluten.
La librairie est également devenue un asile pour les écrivains-voyageurs qui souhaitent y rester quelques nuits. En contrepartie, il leur faut respecter certaines conditions comme lire un livre par jour, aider deux heures à la boutique, et rédiger une page autobiographique en y joignant une photographie.
Nous remontons ensuite la rue des Carmes jusqu'au Panthéon. Michel nous signale au passage au N°8 un magasin de magie "Mayette Magie Moderne". J'ai cru comprendre que comme Obélix il était tombé dedans quand il était petit...
Un peu plus loin, nous passons devant l'église Saint-Ephrem-le-Syriaque, dont le portail est copié sur celui de l'église romaine Saint-André du Quirinal à Rome (une œuvre du Bernin).
Nous voici arrivés sur la place dominant la montagne Sainte-Geneviève. Devant nous l'église Saint-Etienne-du-Mont et la tour Clovis, dernier vestige de l'ancienne abbaye Sainte-Geneviève.
Une rue a en effet été percée au XIXe siècle entraînant la démolition de l'abbaye (qui tombait plus ou moins en ruines) et la tour Clovis fait maintenant partie intégrante du Lycée Henri IV. Remplaçant un édifice du XIIIe siècle, elle est construite à partir de la fin du XVe siècle, et sert de paroisse aux habitants du quartier. Après avoir été brièvement transformée en temple de la Piété filiale sous la Révolution, elle est rendue à ses fonctions d'église paroissiale en 1801 et n'a pas changé d'affectation depuis.
A l'intérieur, nous sommes éblouis par la magnificence du lieu, le regard se portant tout naturellement vers le chœur où subsiste un magnifique Jubé (1530-1540). Un jubé est une clôture séparant la nef du choeur, un peu comme le fait l'iconostase dans les églises orthodoxes.
Il s'agit du seul jubé subsistant dans les églises de Paris : il conjugue une structure gothique avec une ornementation Renaissance.
Il faillit bien être détruit car le Concile de Trente (1542-1563) eut à cœur de faire disparaître cette barrière pour réunir la communauté lors des offices mais l'unanimité n'était pas faite, d'autant plus qu'une perte substantielle de revenus était à craindre. En effet, des particuliers louaient des emplacements sur la tribune du jubé, ce qui rapportait 60 à 80 livres par an à la fabrique de l'église.
Michel nous signale que le jubé de Notre-Dame a été détruit au cours des siècles (en 1548-1550 et en 1789) pour être remplacé, à la demande de Louis XIV par une grille en fer forgé. Lors des fouilles récentes qui ont été effectuées après l'incendie de la cathédrale, les archéologues en ont trouvé des fragments. Le temps étant compté, tout a été recouvert...
La chaire à prêcher est du maître-menuisier Germain Pillon (1651).
La cuve à prêcher est soutenue par un Samson, très costaud évidemment,
et très expressif.
Dans la partie sud de l'église un vitrail représente les deux églises avant le percement de la rue Clovis.
Juste à côté se trouve la châsse, en cuivre, de Sainte Geneviève, vide de ses reliques depuis la Révolution.
La Patronne de Paris (et des gendarmes !) naquit à Nanterre vers 420, issue d'une riche famille aristocratique gallo-romaine. A quinze ans, elle consacra sa vie au Seigneur et s'installa dans Paris dès l'âge de 20 ans. En 451, elle réconforta le peuple effrayé par la menace que faisait peser Attila sur toute la vallée de la Seine. En 465, elle sauva aussi les parisiens de la famine en allant, par la Seine, chercher des vivres jusqu'en Champagne alors que Paris était assiégée par Childéric Ier. Dans sa vieillesse, elle noua des liens d'amitié avec le roi Clovis et la reine Clothilde, raison pour laquelle elle fut inhumée dans l'abbaye voisine, actuel Lycée Henri IV.
Voisine de la châsse de Sainte-Geneviève une très jolie chapelle de style gothique flamboyant : l'église est tellement riche qu'il faudrait plusieurs jours pour la visiter par le menu...
Nous faisons le tour du déambulatoire...
éclairé de ce côté-ci par des verrières datant du XVIe siècle.
Toute l'église est cernée par une coursive ornée d'élégants balcons.
Michel nous entraîne ensuite du côté de la chapelle des Catéchismes construite en 1857 par Victor Baltard. Cette chapelle était réservée à l'enseignement de la religion aux enfants sous l'impulsion de Louis-Philippe.
Je n'étais jamais venue jusqu'ici...
Lui faisant face, la galerie des Charniers (un petit cimetière se trouvait ici autrefois) où se trouve une très belle collection de vitraux peints à l'émail de la fin du XVIe siècle ou du début du XVIIe. Mutilés et dispersés à la Révolution, ils furent à nouveau réunis en 1834 : il n'en reste plus que 12 sur les 22 initiaux.
Le miracle des Billettes à gauche : La seule réalité attestée serait qu’une personne juive, inculpée de profanation d'hostie, a bien été jugée à Paris en 1290.
et l'arche de Noé à droite
Le serpent d'airain (L'histoire raconte l'un des nombreux moments où les Israélites ont douté de Dieu et où Moïse s'est adressé à lui pour les sauver.)
Les lavements des mains et des pieds
Je m'arrête là avec les vitraux car je ne suis pas très experte en religion...
Un grand merci à Michel pour cette visite fort agréable.
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